laurent latapie avocat saisie et commandement 2025
laurent latapie avocat saisie et commandement 2025

Analyse de deux jurisprudences concernant les honoraires d’avocat. Première jurisprudence en lien avec une convention d’abonnement avec la fixation d’honoraires annuels payables d’avance mais dont il n’est absolument pas justifié des actes et diligences. Deuxième jurisprudence relative aux honoraires de résultat en cas de dessaisissement de l’avocat en cours de procédure, lorsque cette procédure s’arrête en l’état d’un protocole d’accord auquel l’avocat n’a pas participé

 

Article :

 

Il convient de s’intéresser aux honoraires d’avocat dans deux jurisprudences qui ont été rendues ce 04 avril dernier et qui viennent aborder la problématique, à la fois des honoraires pris à travers une convention d’abonnement mais également, dans l’hypothèse où des honoraires ont été versés entre les mains de l’avocat et que celui-ci a été dessaisi en cours de procédure afin de déterminer dans quelles conditions ses honoraires devaient être fixés lorsque sa mission était partiellement effectuée.

 

Dans la première des jurisprudences et selon ordonnance attaquée rendue par le Premier Président de la Cour d’appel de Paris, une société H avait confié la défense de ses intérêts à un avocat.

 

Une convention d’abonnement prévoyant un honoraire annuel payable d’avance

 

Une convention d’abonnement avait été conclue en mai 2016 prévoyant un honoraire annuel payable mensuellement et d’avance pour des prestations énumérées de conseil et de consultation dans des domaines commerciaux, fiscaux, sociaux, incluant notamment une réunion mensuelle ayant pour objet de faire le point sur la situation juridique, fiscale et sociale de la société.

 

La facture mensuelle au titre de cette convention d’abonnement avait été réglée par la société sans aucune difficulté.

 

Pour autant, le 13 mai 2019, celle-ci avait saisi le Bâtonnier de l’Ordre des avocats en contestation des honoraires facturés pour les années 2016 et 2017.

 

La contestation des honoraires facturés devant le Bâtonnier de l’Ordre des avocats :

 

À hauteur de Cour de cassation, l’avocat faisait grief à l’ordonnance de fixer le montant des honoraires qui lui sont dus par la société à la seule somme de 10 860.00 € et de le condamner à restituer à cette dernière la somme de 83 940.00 € TTC alors que, selon l’avocat, sauf dénonciation anticipée de remise en cause de la validité d’une convention conclue sous la forme d’un contrat d’abonnement à durée déterminée pour des prestations précises moyennant le versement d’honoraires forfaitaires, le Juge de l’honoraire ne peut réduire lesdits honoraires forfaitaires d’abonnement payés par le client peu important que les factures périodiques émises au titre du contrat d’abonnement ne détaillent pas les diligences effectivement réalisées.

 

Or, l’avocat faisait grief au Premier Président de la Cour d’appel d’avoir retenu, néanmoins pour le condamner à restituer à la société une partie des honoraires d’abonnement perçus en 2016 jusqu’au mois de novembre 2017 en application de la convention d’honoraires du 02 mai 2016 prévoyant le paiement d’honoraires forfaitaires sous forme d’un abonnement prenant effet au 01er mai 2016 pour finir à pareille époque en 2017.

 

Un contrat d’abonnement ne comportant aucune précision sur les actes et diligences effectuées

 

Que les factures au titre de ce contrat d’abonnement ne comportaient pas de précision sur la date et le contenu des actes effectués et que les diligences n’étaient que partiellement justifiées.

 

Pour autant, la Cour de cassation ne partage pas son analyse et vient finalement confirmer la décision du Premier Président de la Cour d’appel de Paris.

 

En effet, la Cour de cassation précise que :

 

« Le montant de l’honoraire librement payé après service rendu ne peut être réduit par le Bâtonnier et le Premier Président dès lors qu’il a été payé en toute connaissance de cause et sur présentation de facture répondant aux exigences de l’article L 441-3 devenu L 441-9 du Code du commerce. »

 

Si, selon le troisième alinéa de l’article 10 du Décret N°2005-790 du 12 juillet 2005, des honoraires forfaitaires payables périodiquement peuvent être convenus entre un avocat et son client, l’avocat reste tenu de délivrer pour chaque période concernée une facture conformément à l’article L 441-9 susvisé.

 

Pour autant, la Cour de cassation précise enfin que :

 

« Ayant relevé que les factures d’honoraires forfaitaires mensuelles se bornaient à faire référence au contrat d’abonnement, sans précision sur la date et le contenu des actes et consultations effectués par l’avocat, le premier président, qui a fait ressortir que ces factures ne répondaient pas aux exigences de cet article, peu important que la convention, en vertu de laquelle elles avaient été émises, ait énuméré les diligences susceptibles d’être réalisées au titre de l’abonnement, en a exactement déduit que le montant des honoraires réclamés sur leur fondement pouvait être réduit en considération des diligences effectuées. »

 

Il convient, de même concert, de s’intéresser à une deuxième jurisprudence qui a également été rendue ce 04 avril dernier.

 

Quels sont les faits de la deuxième jurisprudence ?

 

Dans cette deuxième jurisprudence et selon ordonnance rendue par le Premier Président de la Cour d’appel de Pau, Monsieur J avait confié la défense de ses intérêts à son avocat dans un litige l’opposant à son employeur.

 

Une convention d’honoraires avait été signée entre les parties prévoyant des honoraires forfaitaires et un honoraire de résultat, elle ne comportait aucune clause prévoyant le sort des honoraires en cas de dessaisissement de l’avocat.

 

La délicate question des honoraires de résultat

 

Le 22 mai 2019, Monsieur J a déchargé l’avocat de la procédure et a signé en octobre 2019 une transaction avec son employeur.

 

L’avocat, qui lui a réclamé en vain le paiement de ses honoraires de résultat calculés sur la base de cette transaction, a saisi le Bâtonnier de son Ordre avec une demande de fixation de ses honoraires.

 

Or, à hauteur de Cour de cassation, Monsieur J faisait grief à l’ordonnance de fixer les honoraires de l’avocat à la somme de 16 200.00 € avec intérêts au taux légal alors que, selon lui, le dessaisissement de l’avocat avant qu’il n’ait été mis fin à l’Instance par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable a pour effet de rendre caduque la convention prévoyant un honoraire de résultat.

 

Qu’en l’espèce, il résulte des constatations des Juges du fond qu’il a dessaisi l’avocat avant de conclure un accord transactionnel avec la partie adverse.

 

Dès lors, pour taxer les honoraires de l’avocat à la somme de 16 200.00 €, la Cour d’appel avait décidé que ce dessaisissement intervenu avant qu’il ait été mis fin à l’Instance était sans effet et que la convention d’honoraires devait s’appliquer au motif que l’exposant ne l’avait pas exécuté de bonne foi dès lors que la partie adverse avait manifesté son intention de transiger avant qu’il ne dessaisisse son conseil et que cette proposition de transaction avait été le résultat des diligences de ce dernier.

 

Or, Monsieur J considérait qu’en statuant ainsi le Premier Président de la Cour d’appel de Pau n’avait pas tiré les conséquences légales de ses constatations et considérait par la même que ladite convention était devenue caduque.

 

La Cour de cassation apporte des réponses sur cette problématique de dessaisissement en plein cours de procédure quant au sort des honoraires de résultat.

 

Le sort des honoraires de résultat lors d’un dessaisissement en cours de procédure

 

Elle précise notamment au visa de l’article 10 alinéa 2 de la Loi N°71-1130 du 31 décembre 1971 qu’il résulte de ce texte que lorsqu’à la date du dessaisissement de l’avocat il n’a pas été mis fin à l’Instance par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable, la convention préalable d’honoraires cesse d’être applicable et les honoraires correspondant à la mission partielle effectuée par celui-ci jusqu’à cette date doivent être appréciés en fonction des seuls critères définis par ledit article 10 alinéa 2 de la Loi N°71-1130 du 31 décembre 1971.

 

Ainsi, pour fixer à la somme de 16 200.00 € le montant des honoraires de résultat dus à l’avocat, l’ordonnance retient que le dessaisissement de l’avocat par Monsieur J était intervenu deux jours après la formalisation d’une proposition transactionnelle d’un montant deux fois supérieur à celui initialement proposé par l’employeur.

 

Quid des honoraires en cas de transaction conclue sans la présence de l’avocat

 

Elle en déduit qu’en signant ensuite une transaction sans la présence de l’avocat, la convention avait été exécutée de mauvaise foi par Monsieur J et que le dessaisissement devait être privé d’effet.

 

Pour autant, la Cour de cassation considère qu’en statuant ainsi alors qu’il constatait que le client avait, en cours de procédure et avant la signature d’un protocole d’accord transactionnel, mis fin au mandat confié à l’avocat, le Premier Président a violé le texte susvisé.

 

Pour autant, cette jurisprudence peut déranger car immanquablement il ne faut pas sous-estimer le rôle de la procédure judiciaire et de l’avocat dans le cadre d’une négociation qui se fait tant bien même celle-ci aurait été amorcée en dehors du prétoire d’un Tribunal et en dehors de l’avocat lui-même car il est bien évident que c’est cette menace procédurale qui va amener la partie à négocier.

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat à Fréjus-Saint-Raphaël,

Docteur en Droit, Chargé d’enseignement,

www.laurent-latapie-avocat.fr

 

 

 

 

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