Enquête préliminaire terminée et saisie pénale immobilière, quels pouvoirs du JLD?

Laurent Latapie avocat droit routier

Le juge des libertés et de la détention, le JLD, peut-il ordonner une saisie pénale immobilière, sur la base d’une saisine du Procureur de la République faite en cours d’enquête préliminaire, mais qui rend sa décision postérieurement à la convocation des mis en cause devant la juridiction correctionnelle, dite convocation qui a pour effet de clôturer la procédure d’enquête?

Continue reading

Prestation compensatoire et liquidation judiciaire, le divorce est-il prononcé ?

Résumé :

En cas de divorce prononcé à l’encontre d’un époux en liquidation judiciaire, la fixation de la prestation compensatoire en capital pour un montant de 95 000,00 € sous la forme de l’abandon par le dit époux, débiteur, de sa part indivise dans l’immeuble familial, est-elle opposable à la liquidation judiciaire ? Le mandataire liquidateur peut-il s’y opposer ?

Article :

Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu par la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation en octobre 2021 qui vient aborder le sort d’une prestation compensatoire alors que le débiteur est en liquidation judiciaire alors même que le mandataire liquidateur n’est pas intervenu dans la procédure fixant ladite prestation compensatoire

Quels sont les faits ?

Monsieur et Madame Y mariés sous le régime de la séparation de biens, ont, le 24 juillet 1987, acquis en indivision un immeuble situé à X.

Monsieur Y a été mis en liquidation judiciaire le 13 mars 2008, Maître F étant désignée mandataire liquidateur.

Le divorce de Monsieur et Madame Y ayant été prononcé par un jugement du 9 septembre 2010, un arrêt du 14 septembre 2011, rectifié le 14 novembre 2012, infirmant sur ce point le jugement de divorce, a accordé à Madame Y une prestation compensatoire en capital de 95 000 euros, sous la forme de l’abandon par Monsieur Y de sa part indivise dans l’immeuble précité.

Il importe de préciser que mandataire liquidateur n’était pas partie à cette instance.

Le rôle du mandataire liquidateur

Faisant valoir que les dispositions patrimoniales de cet arrêt étaient inopposables à la procédure collective, le liquidateur a assigné Madame Y devant le Tribunal de Grande Instance pour obtenir le partage de l’indivision et, préalablement, la vente aux enchères de l’immeuble indivis.

Il convient de rappeler le principe du dessaisissement.

Le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire

En effet au visa de l’article L 641-9 du Code de Commerce, le jugement prononçant la liquidation judiciaire emporte dessaisissement pour le débiteur de telle sorte que ce dernier ne peut exercer aucun droit ni aucune action sur son patrimoine.

Il est substitué par le mandataire liquidateur qui a seul qualité pour exercer ses droits et action, et la procédure n’est régulière que si celui-ci est appelé à l’instance et le jugement rendu doit lui être signifié pour lui être opposable. 

Il convient de préciser que le dessaisissement est général et concerne l’intégralité du patrimoine du débiteur de telle sorte que le mandataire liquidateur prend le pouvoir sur l’ensemble de ses biens et actions y compris l’exercice de ses droits dans l’indivision, le pouvoir de transaction….

La jurisprudence ainsi que la chronique viennent rappeler que le dessaisissement de la personne physique mariée porte également sur ses biens communs.

L’attractivité de la procédure collective

L’attractivité de la procédure collective fait que le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire a également une incidence sur les créanciers de l’époux notamment lorsqu’il y a un crédit immobilier commun dans la mesure où la liquidation judiciaire emporte la déchéance du terme pour un des époux alors que l’autre demeure in boni et peut poursuivre le paiement des échéances.

La jurisprudence et notamment, un arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 23 décembre 1997, rappelle que le dessaisissement de la personne interdit à ses créanciers d’exercer des poursuites sur les biens communs en dehors des cas où les créanciers du débiteur soumis à liquidation judiciaire peuvent eux-mêmes agir.

Prestation compensatoire : actif patrimonial ?

La question de la prestation compensatoire est également venue impacter le sort de la liquidation judiciaire et vient impacter le droit de l’entreprise en difficulté d’une manière générale.

Transfert de propriété inopposable

Dans cette jurisprudence, Madame Y ex épouse de Monsieur Y faisait grief à la Cour d’Appel d’avoir déclaré inopposable à la procédure collective le transfert de propriété ordonné par les juges du fond à titre de prestation compensatoire et de revenir sur ce transfert de propriété pour l’annuler et d’ordonner la vente aux enchères publiques sur licitation de l’immeuble en question

Madame Y estimait que le dessaisissement du débiteur soumis à une procédure de liquidation judiciaire ne concerne que l’administration et la disposition de ses biens de telle sorte que ce dernier conserve la possibilité d’intenter seul une action en divorce ou y défendre.

Cette action étant attachée à sa personne de telle sorte qu’elle n’est pas suffisamment patrimoniale pour pouvoir être orchestrée exclusivement par le mandataire liquidateur.

Action en divorce et liquidation judiciaire

Dans la mesure où l’action en divorce est une action attachée à sa personne il fallait inclure la fixation de la prestation compensatoire mise à sa charge qu’importe le droit du mandataire liquidateur à intervenir.

Madame Y faisait grief à la Cour d’Appel d’avoir jugé au contraire que l’action en divorce, même personnelle, en ce qu’elle a des implications financières ne peut échapper à la règle du dessaisissement qui impose que le liquidateur soit appelé en la cause dans la procédure de divorce.

A défaut d’appel en cause du mandataire liquidateur, ladite décision ayant des effets patrimoniaux pouvait déclarer inopposable le transfert de propriété décidé par le juge du divorce au titre du paiement de la prestation compensatoire comme étant contraire à l’article L. 641-9, I, du Code de Commerce.

Il est vrai que la procédure collective a toujours réservé un sort particulier à la pension alimentaire des enfants et à la prestation compensatoire pour l’épouse du chef d’entreprise en liquidation judiciaire et cette jurisprudence ne manque pas de consacrer cette approche de plus en plus extensive qui revient à remettre en question le caractère attractif de la liquidation judiciaire.

Dans le cadre de cette procédure, Madame Y qui n’était pas attraite dans la liquidation judiciaire, puisque les époux étaient mariés sous le régime de la séparation des biens, venait rappeler qu’elle n’avait pas à supporter ni la présence ni la pression du mandataire liquidateur et ce à plusieurs égards.

Action en divorce et présence du mandataire liquiateur

Elle rappelait qu’aucune instance n’était en cours à la date de l’ouverture de la procédure collective du 13 mars 2008, de sorte que l’arrêt des poursuites individuelles n’avait pas vocation à lui être opposée et qu’elle pouvait donc lancer une procédure de divorce.

Elle faisait remarquer que l’immeuble dont il était demandé licitation était sa propriété exclusive depuis l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers qui avait procédé à une confusion entre prestation compensatoire d’un côté et attribution du bien de l’autre puisque la prestation compensatoire avait été fixée   en capital de 95 000 euros, sous la forme de l’abandon par Monsieur Y de sa part indivise dans l’immeuble précité de telle sorte que celui-ci revenait entièrement à Madame.

Ceci est d’autant plus vrai que lorsque la procédure a été terminée, celle-ci n’avait pas manqué de faire les formalités de rigueur auprès de la Publicité Foncière et fournissait aux débats contre le mandataire liquidateur dans la deuxième procédure en inopposabilité la preuve du relevé de propriété qui la désignait comme unique propriétaire de la parcelle en question.

Enfin et surtout Madame Y rappelait en tant que besoin que l’ordonnance de non-conciliation, avait été rendue antérieurement à l’ouverture de la procédure collective de Monsieur Y de telle sorte que celui-ci placé en liquidation judiciaire avait été dessaisi de l’administration et de la disposition de ses biens au profit du mandataire liquidateur au visa des dispositions de l’article L 641-9 du Code de Commerce.

Action en divorce, action personnelle du débiteur ?

Il n’en demeurait pas moins que l’action en divorce qui est une action personnelle nonobstant le fait qu’elle ait des implications financières ne pouvait bénéficier au mandataire liquidateur pour la simple et bonne raison que celle-ci avait été initiée avant l’ouverture de la procédure collective.

Pour autant cette jurisprudence est remarquable, car la Cour de cassation revient sur cette attractivité de la liquidation judiciaire et des effets attachés à son dessaisissement.

La réponse de la Cour de cassation

Elle considère qu’au visa des dispositions de l’article L 641-9 du Code de Commerce le dessaisissement ne concernant que l’administration et la disposition des biens du débiteur en liquidation judiciaire, ce dernier a qualité pour intenter seul une action en divorce ou y défendre.

Cette action, attachée à sa personne, inclut la fixation de la prestation compensatoire mise à sa charge.

Le liquidateur, qui entend rendre inopposable à la procédure l’abandon, à titre de prestation compensatoire, d’un bien personnel du débiteur marié sous le régime de la séparation des biens qui a été décidé par le juge du divorce, doit exercer une tierce opposition contre cette disposition du jugement de divorce.

Pour déclarer inopposable à la liquidation judiciaire de Monsieur Y le transfert de propriété, ordonné à titre de prestation compensatoire le 14 septembre 2011, et prescrire la vente aux enchères de l’immeuble, l’arrêt retient que les implications financières de l’action en divorce n’échappent pas au dessaisissement et en déduit que le liquidateur aurait dû être appelé à la procédure de divorce.

En conclusion, prestation compensatoire et liquidation judiciaire

La Cour de Cassation considère qu’en statuant, ainsi alors qu’il incombait au liquidateur de former tierce opposition au jugement de divorce pour faire déclarer inopposable à la liquidation judiciaire la disposition de ce jugement ayant décidé l’abandon à Madame Y de la part de Monsieur Y dans l’immeuble acquis par eux en indivision, la Cour d’Appel a violé le texte susvisé.

Cette jurisprudence rappelle que le principe de dessaisissement profite au mandataire liquidateur et ce dans l’intérêt collectif des créanciers de la procédure collective.

Elle rappelle également que, dans le cadre d’une procédure judiciaire tendant à déterminer le montant d’une prestation compensatoire lors d’un divorce, le mandataire liquidateur n’a pas forcément vocation à être impliqué dans le principe ceci d’autant plus quand la procédure est engagée avant la liquidation judiciaire.

Dans la mesure où le mandataire liquidateur ne formerait pas tierce opposition, il ne pourrait aller à l’encontre de l’autorité de la chose jugée de la décision du Juge aux Affaires Familiales.

Cette est jurisprudence est d’importance,

D’autant plus lorsque la prestation compensatoire fixée, a été payée sous forme d’abandon des droits indivis du débiteur au profit de son ex-épouse, tranchant ainsi le sort du domicile familial, au détriment de la liquidation judiciaire.

L’effet attractif de la procédure collective, patrimonial par nature, résisterait alors à l’intérêt familial, notion par essence personnelle,

A bon entendeur,

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

La faute de l’organisme caution et la perte de chance pour les emprunteurs de contester leur engagement de prêt

Laurent LATAPIE avocat 2021 Guadeloupe caution
Laurent LATAPIE avocat 2021 Guadeloupe caution

Résumé :

Un organisme de cautionnement, qui n’avertit pas les emprunteurs de la sollicitation du prêteur, alors que ces deniers disposaient d’un moyen de nullité leur permettant d’invalider totalement ou partiellement leur obligation principale de remboursement, peut-il être totalement déchu de son droit à remboursement à hauteur des sommes que les emprunteurs n’auraient pas eu à s’acquitter ?

Article :

Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation en septembre 2020 et qui vient se prononcer sur le recours par la caution du débiteur principal dans le cadre d’un contrat de cautionnement et de prêt.

Quels sont les faits ?

Dans cette affaire, un prêt immobilier a été consenti par la banque M et les emprunteurs Q. Un organisme de cautionnement s’était porté caution dans le même prêt.

La banque a alors prononcé déchéance du terme à la suite d’échéances impayées.

La caution, qui a alors désintéressée le créancier principale, la banque, c’est alors retourné et a mis les emprunteurs en demeure de lui rembourser les sommes réclamées par la banque.

C’est dans ces circonstances que les époux emprunteurs ont assigné la banque ainsi que la caution en nullité du contrat de prêt et du cautionnement et en paiement de dommages et intérêts.

Dans le même laps de temps, l’organisme de caution assigne les emprunteurs en remboursement des sommes réclamées par la banque M.

Un premier arrêt a été rendu par les juges du fonds au recours de la nullité du contrat de prêt au motif pris qu’il y avait un démarchage irrégulier à l’encontre des époux emprunteurs.

La nullité du contrat de prêt et le cautionnement

La caution a alors interjeté l’appel de la décision rendue en première instance, et dans un arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles, cette dernière a estimé que l’obligation de remboursement envers la caution devait être réduite à sa simple proportion.

Dans sa décision du 09 septembre 2020, la première chambre civile de la Cour de cassation vient confirmer l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles.

Le pourvoi était double, avec un pourvoi principal émis par l’organisme caution et un pourvoi incident formulé par le couple emprunteur.

L’organisme de caution, dans son pourvoi principal, reprochait à la Cour d’appel de limiter la condamnation des emprunteurs à lui payer le capital prêté, avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement déduction faites des sommes versées par les emprunteurs.

Concernant le pourvoi incident formulé par les époux emprunteurs, ces derniers reprochaient à l’arrêt de la Cour d’appel de les avoir condamnés à payer à la caution, le capital prêté avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement.

La problématique de cette jurisprudence est de savoir si l’organisme de cautionnement, qui n’avertit pas les emprunteurs de la sollicitation du prêteur, alors que ces deniers disposaient d’un moyen de nullité leur permettant d’invalider totalement ou partiellement leur obligation principale de remboursement, peut être totalement déchu de son droit à remboursement à hauteur des sommes que les emprunteurs n’auraient pas eu à s’acquitter.

La déchéance du droit à remboursement des emprunteurs

Concernant le pourvoi principal, la Cour de cassation confirme que l’organisme caution avait manqué à ses obligations envers les emprunteurs de telle sorte que ces derniers étaient déchus de leur droit de recevoir un remboursement concernant les sommes que les emprunteurs n’avaient pas payé.

Concernant le pourvoi incident, formulé par les époux emprunteurs, la Cour rappelle que l’obligation de remboursement desdits emprunteurs envers la caution ne devaient concerner que des sommes qui ne sont pas déjà payées.

Cette jurisprudence appelle plusieurs observations.

Le droit de remboursement de la caution

La première est relative à l’absence du droit de remboursement de la caution par les emprunteurs du fait d’un manquement à l’obligation d’information de cette dernière.

Et la deuxième est relative à l’obligation de remboursement partiel des emprunteurs envers la caution pour les sommes qui sont dues au créancier.

Concernant l’absence du droit au remboursement de la caution par les emprunteurs, il convient de rappeler que le devoir d’information et les recours de l’organisme de cautionnement envers son débiteur existent et son nombreux.

Le devoir d’information de la caution envers l’emprunteur

En effet, le devoir d’information existe dans le contrat de cautionnement, contrat par lequel, une personne, la caution, s’engage envers un créancier à satisfaire l’exécution de l’obligation de contractuelles lorsque le débiteur n’y satisfait pas lui-même.

Et ce, contrairement à l’article 2288 du code civil, afin de bénéficier de ces recours, la caution doit appliquer son devoir d’information envers ses débiteurs et naturellement de les prévenir lorsque celle-ci a désintéressé le créancier en taux et en partie.

Et c’est toute la subtilité de ce contentieux par rapport aux organismes de caution que ladite caution dispose tantôt d’un recours personnel, comme le rappelle l’article 2305 du code civil et tantôt d’un recours subrogatoire conformément à l’article 2306 du code civil, contre son ou ses débiteurs, lorsqu’elle a déjà payé le créancier.

Le recours personnel de la caution contre l’emprunteur

Rappelons que, d’après l’article 2305 du code civil, la caution qui a payé son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement a été donné au su et à l’insu des débiteurs.

Ce recours à lieu, tant pour le principal que pour les intérêts et frais.

Néanmoins, la caution n’a de recours que pour les faits qu’elle a dénoncé au débiteur principal.

L’article 2306 dispose quant à lui que : La caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu’avait le créancier contre le débiteur.

Or, force est de constater que l’organisme caution n’a pas rempli ses obligations d’information à l’encontre de l’emprunteur.

L’obligation d’information de la caution

En effet, la Cour de cassation rappelle, dans sa décision, que la caution a désintéressé la banque à la suite de la présentation d’une lettre de sa part l’engageant à la tenir informée de cette décision à la suite des impayés des emprunteurs, alors même que ledit organisme caution n’a pas cru bon avertir les emprunteurs de cette sollicitation alors même que ces derniers qui disposaient d’un moyen de nullité permettant d’invalider, au moins partiellement, leur obligation principale de remboursement.

Dès lors, quelle sanction pouvait s’imposer à l’organisme caution dans sa négligence envers ses créanciers concernant l’erreur d’information ?

A bien y comprendre la Cour de cassation, la sanction semble être la déchéance des recours possibles.

La sanction par la caution du défaut d’information

En effet, le manquement au droit d’information de la caution envers son ou ses débiteurs est prévu par législateur en l’article 2308 du code civil, lequel article prévoit :

La caution qui a payé une première fois n’a point de recours contre le débiteur principal qui a payé une seconde fois, lorsqu’elle ne l’a point averti du paiement par elle fait ; sauf son action en répétition contre le créancier.                                                                                                                                          Lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n’aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte ; sauf son action en répétition contre le créancier.

C’est justement sur ce point que cette jurisprudence est intéressante puisque la Cour de cassation vient sanctionner l’absence d’information préalable des emprunteurs par l’organisme caution, conformément aux dispositions de l’article 2308 du code civil, puisque force est de constater que la caution avait manqué à ses obligations à leurs égards.

L’organisme caution devait donc être déchu de son droit au remboursement à hauteur des sommes que ces derniers n’auraient pas eu à acquitter.

La déchéance du droit au remboursement

A bien y comprendre, si la caution n’avait pas manqué à son devoir d’information envers les époux emprunteurs, ces derniers auraient pu déclarer leur dette éteinte.

Pour autant, la question peut se poser de savoir si oui ou non les emprunteurs sont tenus à l’obligation de remboursement total ou partiel envers la caution pour les sommes qui sont dues au créancier et pour lequel ce dernier fit jouer son recours sinon subrogatoire à tout le moins personnel ?

En effet, il convient de rappeler que par principe, les emprunteurs sont tenus à une obligation de remboursement intégral envers leur caution si cette dernière est venue payer les créanciers à leur place, lorsque justement la caution a justement exercé son obligation dans le contrat de cautionnement qui consiste à satisfaire l’exécution de l’obligation contractuelle lorsque le débiteur n’y satisfait pas lui-même tel que nous l’avons abordé au visa des articles 2305 et 2306 du code civil.

Pour autant, la jurisprudence revient sur cette exception, puisque lorsque la caution paye sans avertir les emprunteurs alors que ces derniers avaient la possibilité de faire déclarer leur dette éteinte,

La Cour de cassation vient effectivement consacrer cette exception en rappelant que la caution à désintéressée la banque à la suite de la présentation d’une lettre de sa part, l’engageant à la tenir informé de sa décision à la suite d’impayés des emprunteurs, et qu’elle n’a pas avertie de cette sollicitation ces derniers, qui disposaient alors d’un moyen de nullité permettant d’invalider partiellement leur obligation principale de remboursement.

L’obligation d’information de la caution

Dès lors, la Cour de cassation, dans sa jurisprudence, vient finalement consacrer l’obligation d’information de remboursement partiel des emprunteurs par la caution, sanctionnée, pour le coup, pour impossibilité de faire déclarer leur dette éteinte au moment du paiement de la dette par ladite caution.

Ainsi, la Cour souligne qu’au moment des paiements effectués par la caution, les emprunteurs n’avaient pas les moyens de faire déclarer leur dette éteinte, mais disposaient cependant de la possibilité d’obtenir l’annulation du contrat de prêt.

C’est dans ces circonstances que les juges ont donc décidé que l’obligation de l’emprunteur vis-à-vis de la caution a ainsi été limité au remboursement du capital versé par la banque, déduction faite des sommes déjà payées.

Avec cet arrêt récent de la première chambre civile de la Cour de cassation de septembre 2020, on peut constater un assouplissement de la déchéance du droit des recours de la caution au profit des emprunteurs.

La déchéance du droit de recours de la caution contre l’emprunteur

Ainsi, dès lors que cette annulation conduisait à ce qu’ils restituent à la banque le capital versé déduction faite des sommes déjà payées, l’obligation de remboursement des emprunteurs à l’égard de la caution devait être limitée dans sa proportion.

A bien y comprendre, lorsque la caution a manqué à son obligation d’information, suite au paiement de tout ou une partie de la dette, le ou les débiteurs se retrouvent dans l’impossibilité de voir déclaré leur dette éteinte au moment de ce paiement, ils peuvent obtenir à l’encontre de l’organisme caution une déchéance totale ou partielle des sommes qu’ils auraient dû initialement devoir rembourser à l’organisme caution en remboursement des sommes payées par elle.

Forte heureusement, cette jurisprudence n’est pas isolée,

En effet, un autre arrêt a été rendu par la première chambre civile de mars 2021 qui vient également mettre en lumière la subtilité de ce contentieux opposant l’emprunteur à l’organisme caution d’un côté, et l’emprunteur et l’établissement bancaire de l’autre.

Dans cette autre jurisprudence, l’emprunteur avait aussi invoqué, en premier lieu l’irrégularité du prononcé de la déchéance du terme affectant l’exécuté, et en second lieu, un manquement de la banque à son devoir de mise en garde, ainsi que l’octroi de dommages et intérêts à l’encontre de l’organisme caution car l’emprunteur, de par son fait, n’avait pas été en mesure de faire déclarer sa créance éteinte.

Pour autant, dans cette autre affaire, la Cour de cassation a considéré qu’ayant constaté que les conditions de l’article 2308 alinéa 2 du code civil n’étaient pas réunies, la cour d’appel n’était pas tenue de rechercher si la caution a commis une faute.

Pour la Haute juridiction, d’une part il n’avait pas été invoqué de faute distingue de celle-ci, qui a payé les sommes réclamées par la banque, et d’autre part, l’emprunteur avait, semble-t-il, conservé la possibilité d’invoquer, à l’encontre de la banque, un manquement à son devoir de mise en garde.

S’il est vrai que les jurisprudences se suivent et ne se ressemblent pas, elles rappellent surtout, et c’est cela qui est très important, que lorsque l’organisme de caution, qui désintéresse la banque alors que l’emprunteur principal est défaillant, se retourne immédiatement contre l’emprunteur, celui-ci bénéficie de moyens de défenses tant à l’encontre de l’organisme caution qu’à l’encontre de l’établissement bancaire initial.

La relation tripartite emprunteur banque et organisme caution

Les montages financiers proposés par des établissements bancaires assortis d’un cautionnement réservé à un organisme caution, proche cousin de ladite banque, sont nombreux.

Les hypothèses sont alors nombreuses, en cas d’impayés de l’emprunteur malheureux qui rencontre des difficultés, l’organisme caution désintéresse l’établissement bancaire dans le cadre d’échanges internes qu’ignore complètement ledit emprunteur.

Passé le règlement des sommes impayées par l’organisme caution, ce dernier se retourne, comme de rien, contre l’emprunteur, bien souvent en agrémentant son action d’une hypothèque judiciaire provisoire afin de grever le bien immobilier de l’emprunteur malheureux qu’il entend saisir par la suite.

L’organisme caution se réfugiant alors derrière l’article 2305 du code civil en évoquant son recours personnel qui empêche les emprunteurs d’opposer à l’organisme caution, ce qu’ils auraient pu opposer à l’établissement bancaire.

Il est impératif d’appeler en cause, et d’assigner en intervention forcée dans cette procédure le créancier initial afin de pouvoir organiser une discussion tripartite, et si la responsabilité de la banque est engagée, d’en tirer judiciairement et juridiquement les conséquences à la fois contre l’établissement bancaire,  mais également contre l’organisme caution, à ce que les discussions soient réparties intelligemment, que les droits de chacun soient protégés et que l’emprunteur sache comment se défendre et attaquer, tantôt contre l’un, et tantôt contre l’autre.

A bon entendeur,

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

https://www.laurent-latapie-avocat.fr/organisme-caution-et-decheance-du-terme-qui-paye/

Financement du logement familial et apport de l’un des époux ou partenaire de PACS

 

Laurent Latapie Avocat Miami
Laurent Latapie Avocat Miami

Logement familial

Résumé :

Quelle est la qualification juridique de l’apport important d’un des époux séparé de bien dans le financement du logement familial ? Cet apport est-il distinct de la contribution aux charges du mariage ? Les partenaires du PACS peuvent-ils revendiquer cette jurisprudence ?

Article :

Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu en mars dernier par la Cour de cassation qui vient aborder le cas du financement du bien familial, lorsque l’un des époux procède à un apport important.

Cette jurisprudence s’appliquant pour des époux mariés sous le régime de la séparation de biens.

Cette jurisprudence s’applique aussi aux partenaires de pacs,

En effet, finalement le régime propre aux époux mariés sous le régime de la séparation de biens est tout aussi utilisable pour les partenaires lorsque le couple vient de se pacser,

Les époux mariés sous le régime de la séparation de bien

Elle peut également et parfaitement s’appliquer, de la même manière, à des partenaires de PACS, qui ont les mêmes droits,

les partenaires de Pacs

Quels sont les faits ?

Dans cette affaire, un jugement avait prononcé le divorce de Monsieur V et Madame T, mariés sous le régime de la séparation de biens.

Des difficultés étaient nées lors du règlement de leurs intérêts patrimoniaux car le bien acquis par les époux avait été financé par un apport personnel de Madame T à hauteur de 105 200,18 euros qui avait demandé le remboursement de cet apport.

Les intérêts patrimoniaux

En effet par acte notarié reçu le 24 janvier 1992, Monsieur V et Madame T avaient acquis un terrain en indivision, à concurrence de moitié chacun.

Par acte notarié reçu le 11 décembre 1992, Madame T avait souscrit un prêt épargne logement et un prêt conventionné d’un montant total de 868.500 francs destiné à rembourser par anticipation le précédent prêt contracté le 24 janvier 1992 et à financer les travaux de construction d’une villa.

Monsieur V s’était porté caution solidaire et hypothécaire du remboursement de ce prêt.

Caution solidaire et hypothécaire

Madame T avait, en outre, effectué un apport personnel de la somme de 179.500 francs pour permettre la réalisation de ce projet de construction.

Les deux époux avaient réglé par moitié les échéances des prêts jusqu’à leurs remboursements anticipés.

Le prêt conventionné avait été remboursé par anticipation à parts égales par chacun d’eux.

Le prêt épargne logement avait été remboursé par anticipation, en juin 1998 par Madame T qui revendiquait une créance au titre de l’achat du terrain et du coût des travaux construction de la villa sur ce terrain et considérait qu’il s’agissait d’une créance contre l’indivision soumise aux dispositions de l’article 815-13 du Code Civil et non une créance entre époux régie par les articles 1543 et 1479 du même code. 

Quel est le sort de l’apport personnel ?

Or, dans le cadre de cette procédure, Madame T faisait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande de créance au titre de l’acquisition du bien immobilier au motif que seul le remboursement par l’un des conjoints marié sous le régime de la séparation de biens des échéances d’emprunt, à l’exclusion d’un apport en capital personnel, destiné à financer l’acquisition en indivision de la résidence principale ou secondaire de la famille, était susceptible de participer de l’exécution de sa contribution aux charges de la vie commune ou du mariage.

Madame T insistait en effet sur le fait que le logement principal des mariés avait été financé par un apport en propre de Madame T de 105 200,18 euros.

La Cour d’Appel l’avait cependant déboutée de sa demande de créance contre son mari au motif que les versements effectués par l’un des mariés pendant le mariage tant pour régler le prix d’acquisition d’un bien immeuble constituant le domicile conjugal que pour rembourser les mensualités des emprunts immobiliers contractés pour en faire l’acquisition participent de l’exécution de son obligation de contribution.

Cependant, sommes-nous vraiment sur le terrain de la contribution aux charges du mariage ?

La contribution aux charges du mariage

Madame T considérait que si le remboursement des échéances de l’emprunt était susceptible d’être considéré comme une contribution aux charges il n’en demeurait pas moins que son apport ne pouvait être considéré comme tel et devait lui être restitué.

Madame T soutenait que le remboursement par l’un des époux mariés sous le régime de la séparation de biens des échéances d’emprunt, à l’exclusion d’un apport en capital personnel, destiné à financer l’acquisition en indivision de la résidence principale ou secondaire de la famille, était susceptible de participer de l’exécution de sa contribution aux charges de la vie commune.

La Cour de cassation rejoint l’approche de Madame T.

La haute juridiction considère que, sauf convention contraire des époux, l’apport en capital de fonds personnels, effectué par un conjoint séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l’acquisition d’un bien indivis affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges.

Il ne s’agit donc pas d’une contribution proprement dite.

tant bien même la partie adverse entendait modifier sa qualification,

Or, la Cour d’appel, pour rejeter la demande de créance de Madame T au titre de l’acquisition du bien immobilier, avait constaté que l’immeuble, acquis par les mariés pour constituer le logement de la famille, avait été financé pour partie au moyen d’un apport personnel de Madame T.

La Cour d’appel retenant que la clause du contrat de mariage stipulant que chacun des mariés sera réputé s’être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges leur interdit de prouver que l’un ou l’autre ne se serait pas acquitté de son obligation, et que, dès lors, les versements effectués par l’un d’eux pendant leur union, tant pour régler le prix d’acquisition d’un bien immobilier constituant le domicile conjugal que pour rembourser les mensualités des emprunts immobiliers contractés pour en faire l’acquisition, participent de l’exécution de son obligation de contribution aux charges du ménage, sauf s’ils excèdent ses facultés contributives.

Cette approche est sanctionnée par la Cour de cassation.

Il n’est pas question de contribution au charges du ménage,

Ni même d’une « sur contribution ».

La Cour de cassation est très claire.

L’apport personnel pour l’acquisition du bien principal n’est pas une contribution aux charges du mariage, qu’importe la succession des règlements effectués par la suite par les partenaires,

Qu’en est il des partenaires de pacs?

Cette jurisprudence est à saluer aussi pour les partenaires en cas de pacs,

Rappelons que le pacs est un contrat qui offre aux couples non mariés la possibilité d’organiser leur vie commune, avec plusieurs avantages pour les partenaires du pacs,

Rappelons que les partenaires liés par un pacs s’engagent à une vie commune.

Cette vie commune s’accompagne d’une aide matérielle et d’une assistance réciproque,

 A défaut de convention contraire, la dite aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives,

or, cette jurisprudence est interessante car elle peut être parfaitement étendue à des partenaires en cas de pacs,

Dans le cadre d’un achat immobilier, les deux partenaires vont solidairement s’engager à faire face aux échéances d’un prêt si celui-ci est nécessaire pour l’acquisition de leur domicile, les deux partenaires étant alors tenus de supporter solidairement l’engagement bancaire,En effet, dans le cas d’un pacs, si l’un des partenaires apporte des fonds propres dans l’investissement du bien immobilier que le partenaire déciderait d’acquérir avec son autre partenaire, le montant de ses apports serait alors préservé et il serait en droit de revendiquer la restitution de cette somme.

Pour autant, en cas d’apport important en propre de l’un des partenaires, la question demeure strictement identique quant à la qualification de cet apport et du sort à lui donner en cas de séparation et de liquidation des actifs communs aux deux partenaires,

En effet, l’autre partenaire ne pourrait réclamer un partage strictement indivisaire de cette somme ou bien encore le considérer comme une contribution aux charges du pacs,

Il n’est effectivement pas rare de constater qu’en cas de fin de pacs, les partenaires viennent également discuter âprement la répartition des fonds découlant des actifs acquis en commun par les partenaires de pacs, tant bien même ces derniers seraient assujettis à un convention de pacs séparatiste.

Dès lors, même si dans le cadre d’un pacs la question de la contribution aux charges du pacs s’impose, il n’en demeure pas moins que le partenaire de pacs qui a fait un apport personnel important a le droit de revendiquer la restitution de son apport,

L’autre partenaire de pacs ne peut valablement considérer que l’apport du partenaire de pacs servant à l’acquisition en indivision de la résidence principale ou secondaire des partenaires de pacs, était susceptible de participer de l’exécution de sa contribution aux charges de la vie commune du couple pacsé.

Quid de l’apport du partenaire?

Ainsi, le partenaire voit son apport personnel protégé.

Tout comme l’époux séparé de bien,

le partenaire a donc parfaitement le droit de faire valoir le montant de son apport en propre.

l’autre partenaire n’ayant donc pas le droit de le comprendre comme une simple contribution aux charges,

Il n’y a donc aucun désavantage pour les partenaires à se pacser et effectuer un apport important,

Le partenaire conservant son droit de le revendiquer par la suite, qu’importe la succession de règlements qu’il aurait effectué,

ainsi, même sur ce terrain financier et en cas d’investissement commun se pacser n’est pas un danger pour l’apporteur de fonds en propre.

L’autre partenaire ne peut le considérer comme une contribution aux charges des partenaires, tant bien même, en suite de cet apport, chacun des partenaires participe et contribuent chacun au paiement du crédit afférent au bien.

Ainsi il est donc possible de rendre à César ce qui est à César,

Cette jurisprudence vient clairement considérer que si l’un des époux ou l’un des partenaires pacsés vient contribuer à l’acquisition d’un bien principal par un apport en propre, ce dernier a le droit d’en demander le remboursement lors de la séparation.

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat à Fréjus, Avocat à Saint Raphael, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

https://www.laurent-latapie-avocat.fr/reforme-des-retraites-et-sort-de-lallocation-veuvage/