Rejet du plan de sauvegarde, quelles alternatives pour le chef d’entreprise?

Laurent LATAPIE Avocat Docteur en Droit

Une entreprise en sauvegarde de justice qui voit son projet de plan sauvegarde rejeté par le Tribunal de commerce, peut-il présenter un nouveau plan de sauvegarde ou bien se diriger inévitablement vers un redressement ou une liquidation judiciaire ? Lorsque le Droit de l’entreprise en difficulté se retrouve à avoir horreur du « vide ». Exemple jurisprudentiel du Tribunal de Commerce de Fréjus.

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L’action du créancier non soldé dans le cadre d’un plan de redressement,

La question qui se pose est de savoir si, dans la mesure où le plan de redressement, octroyé sous l’ancien régime juridique antérieur à 2005, a fait l’objet d’un jugement de clôture, le créancier non entièrement réglé de sa créance admise au passif vocation à poursuivre le débiteur, redevenu in boni, aux fins de paiement.

 

Article :

 

Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu en mai 2018 par la Cour d’Appel d’Aix en Provence et qui vient aborder la problématique d’un plan de redressement exécuté en son intégralité sous la loi du 26 juillet 2005.

 

Le plan a été clôturé et l’un des créanciers n’aurait pas été soldé de sa créance.

 

Dans cette affaire, Madame C avait été placée en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de Commerce de Saint Tropez (avant sa disparition) en septembre 2001 et un mandataire judiciaire avait été désigné.

 

Madame C demeurait redevable du solde du prix de cession du fonds de commerce au bailleur Monsieur V.

 

Le 23 juillet 2002, le même Tribunal de Commerce a adopté le plan de redressement proposé par Madame C qui comprenait notamment avec une cession partielle d’un des fonds de commerce appartenant à la débitrice,

 

Le mandataire judiciaire avait été désigné commissaire à l’exécution du plan.

 

Il était prévu que les fonds découlant de cette cession soit affectée au premier dividende et le plan avait été accepté moyennant plusieurs options.

 

L’option 1 était de régler 26% de la créance dans les trois mois du jugement et l’option de régler la créance à hauteur de 100% dans les 10 ans du plan.

 

Par jugement du 26 octobre 2010, le Tribunal de Commerce a modifié le plan de redressement arrêté le 23 juillet 2002 et autorisé le report de l’échéance impayée 20009 sur les échéances 2010, 2011 et 2012.

 

Nonobstant la clôture de ce plan de redressement, les consorts V, créanciers inscrits et admis au passif de la procédure collective, ont assigné Madame C devant le Tribunal de Commerce en paiement de la somme de 10 029,92 euros leur restant due sur la créance déclarée à titre privilégiée au passif de la procédure collective de Madame C à hauteur de 20 199,49 euros.

 

Ils précisaient n’avoir reçu dans le cadre du plan de redressement que la somme de 10 169,57 euros versée par Maître M en qualité de commissaire à l’exécution du plan et que la durée du plan était expiré.

 

La question qui se pose est de savoir dans la mesure où le plan de redressement a fait l’objet d’un jugement de clôture, si le créancier non réglé avait vocation à poursuivre sous l’empire de l’ancienne loi le débiteur aux fins de paiement.

 

Il convient de rappeler que la procédure collective de Madame C avait été ouverte en septembre 2001 et donc soumise aux dispositions antérieures de la loi du 26 juillet 2005.

 

Il résulte des dispositions des articles L 621-65 et L 621-82 du Code de Commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 que lorsque le plan de redressement est arrivé à son terme sans avoir fait l’objet d’une décision de résolution, le créancier dont la créance admise n’a pas été totalement réglé, recouvre son droit de poursuites individuelles contre le débiteur.

 

De telle sorte qu’en l’absence de résolution du plan de redressement, seules les sommes dues en vertu de ce plan ou des accords auxquels il se réfère peuvent faire l’objet de réclamation de la part du créancier.(Cour de Cassation Chambre Commerciale 13 septembre 2017).

 

Dès lors les tentatives du débiteur sont alors vaines pour tenter d’échapper au paiement du solde de la créance.

 

La difficulté qui apparait est celle relative à la position du mandataire judiciaire puisque le délai de 10 ans était écoulé et que tout laissait à penser que le plan de redressement devait être clôturé.

 

Or dans cette affaire, le Tribunal de Commerce avait rendu un jugement le 14 novembre 2016 dans lequel il répondait à la requête en résolution du plan de redressement en date du 27 mai 2013, par le commissaire à l’exécution du plan alors en fonction, soit plus de 3 ans après la saisine de la juridiction…,

 

Dans la mesure où le commissaire à l’exécution du plan avait fait valoir ses droits à la retraite, un mandataire judiciaire a été nommé par ledit jugement en qualité de mandataire ad hoc avec mission de faire le paiement des sommes restant dues au plan de redressement, recevoir les sommes auprès du débiteur, les répartir ou les consigner à la Caisse des Dépôts et Consignations, rendre compte de sa mission et d’y mettre fin.

 

On ne peut que s’étonner de cette décision hybride qui vient non pas mettre fin au plan de redressement alors que le délai de 10 ans est largement écoulé ni même faire le point mais vient désigner un mandataire ad hoc qui viendrait en suite du commissaire à l’exécution du plan afin de s’assurer si l’ensemble du passif a été réglé.

 

Cela peut sembler d’autant plus curieux que, classiquement, dans le cadre de l’exécution du plan, le commissaire à l’exécution du plan a vocation à s’assurer que l’échéance annuelle a été réglée par le débiteur et que les créanciers sont interrogés pour s’assurer qu’il n’y a pas de manquements quelconques.

 

La Cour d’Appel ne s’y trompe pas et reste basée sur des principes fondamentaux découlant de l’ancien régime en rappelant que l’action engagée alors que le plan de redressement est expiré depuis le 23 juillet 2012 par un créancier souhaitant être réglé du solde de sa créance admise au passif est parfaitement recevable dans la mesure où ce dernier recouvre son droit de poursuite individuelle contre le débiteur pour les créances admises mais non intégralement réglées.

 

Dès lors, la désignation d’un mandataire ad hoc après l’expiration du plan de redressement d’une durée de 10 ans insusceptible d’être prolongé, ne peut faire échec à l’exercice par les créanciers de leur droit de poursuite.

 

L’absence d’intervention volontaire ou forcée du mandataire ad hoc est sans conséquence sur les recevabilité des demandes présentées par Monsieur V.

 

Le débiteur se défend en soutenant que la créance était soldée notamment en ce que le solde de la créance avait été reversé entre les mains du mandataire judiciaire en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de telle sorte qu’il appartenait à ce dernier de régler directement Monsieur V.

 

Le débiteur laisse à penser qu’in fine, ce serait de la responsabilité du mandataire judiciaire d’avoir mal affecté les fonds alors que ce dernier avait pour mission de vérifier que l’ensemble des créanciers avaient bel et bien été soldé.

 

La Cour reproche au débiteur de ne pas rapporter la preuve de ce que le mandataire judiciaire aurait bien les fonds en question et que ces fonds n’auraient pas vocation à être réglés au créancier en tant que tel.

 

Cet arrêt est intéressant puisqu’il rappelle que sous l’empire de l’ancien régime, le créancier non soldé de sa créance admise au passif de la procédure collective peut poursuivre en paiement le débiteur quand bien même le plan de redressement judiciaire aurait été clôturé.

 

Il rappelle également que désormais tout cela n’est plus d’actualité tant le commissaire à l’exécution du plan a désormais l’obligation de s’assurer année par année du parfait paiement des échéances du plan qu’il assure désormais lui même.

 

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

 

 

 

Cession des parts de la société et substitution de caution

Quelle est l’efficacité d’une clause de substitution de caution dans une cession de parts de société en redressement judiciaire face à un établissement bancaire ?

 

Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu par la Cour d’appel de Lyon en ce printemps 2018 et qui vient aborder la question spécifique de l’associé d’une entreprise, également caution, alors que ce dernier a procédé à une cession des parts de la société,

 

En effet, dans cette affaire le gérant caution était poursuivi par la banque alors même que l’entreprise avait fait l’objet d’un redressement judiciaire,

 

Et alors même que dans le cadre de ce redressement judiciaire une cession des parts de la société au profit d’un repreneur avait été envisagée pour permettre une bonne reprise de l’activité et au travers d’un plan de redressement viable,

 

Cette cession des parts au profit du tiers repreneur s’accompagnait dans l’acte de cession d’une reprise de l’engagement de la caution.

 

La pratique montre bien que si l’idée même d’un plan de redressement de l’entreprise avec une cession des parts par un tiers repreneur peut avoir quelque avantage il n’en demeure pas moins qu’il peut arriver que le vendeur de parts, par ailleurs gérant et caution, omette son sort particulier en qualité de caution et ne s’assure pas de pleine et parfaite effectivité de la transmission de l’engagement de la caution qui devrait normalement accompagner la cession de parts.

 

Dans cette affaire, la société E avait été constituée en octobre 98 et avait pour activité la vente de jouets sous une enseigne bien connue les consorts D étant titulaires de toutes les parts de la société et Monsieur D était par ailleurs le gérant de la société.

 

C’est dans ces circonstances que par acte du 28 août 2009 Monsieur D s’était porté caution solidaire de toutes les obligations dont la société E pourrait être tenue à l’égard de la banque dans une limite de 20 000 euros et ce pour une durée de 10 ans.

 

C’est cet engagement de cautionnement de tout engagement qui mérite bien souvent d’être contesté car même si dans le cas présent le plafond reste raisonnable, il n’en demeure pas moins que dans d’autres cas d’espèces les montants sont parfois bien plus importants et mettent en difficulté le gérant qui n’appréhende pas forcément au moment de la signature de l’engagement de caution, sa portée.

 

Car, il est vrai que dans cette affaire, en vue du financement de l’ouverture d’un nouveau magasin, la banque avait alors consenti, le 18 mai 2010, à la société E un prêt d’équipement de près de 225 000 euros, ce qui ni n’est pas rien,

 

Par acte du même jour, Monsieur D s’était alors porté caution solidaire de ce prêt en sus du premier engagement de caution dans la limite de 45 000 euros.

 

Enfin et surtout, la société E avait également souscrit le 31 mai 2013 un billet à ordre tiré sur le compte de la banque d’un montant de 75 000 euros avec l’aval de son gérant, et une échéance au 30 octobre 2013.

 

Cependant, difficultés économiques faisant, le Tribunal de Commerce de Bourg en Bresse avait, en juin 2013, prononcé le redressement judiciaire la société E.

 

De même, la banque a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire pour la somme de 246 123,46 euros.

 

Par suite, en l’état de l’ouverture de la procédure collective, et par acte du 15 octobre 2013 la banque a assigné Monsieur D, en sa qualité de caution, et ce, en l’état de l’arrêt des poursuites individuelles, afin que le Tribunal de Commerce déclare sa créance à l’encontre de la caution bien fondée, et prononce le sursis à statuer dans l’attente de l’issue de la procédure de redressement initial.

 

Il est bon effectivement de rappeler qu’à ce stade, en cas d’un redressement judiciaire, si la jurisprudence et les textes permettent au créancier de prendre des garanties à l’encontre de la caution, il n’en demeure pas moins que le principe de l’arrêt des poursuites individuelles empêche la banque de poursuivre l’entreprise mais également le gérant caution, au moins pendant l’année du redressement judiciaire.

 

Pour autant, cela n’avait pas arrêté la banque qui avait souhaiter ses garantir envers la caution,

 

Or, au cours de la période d’observation, les consorts M ont souhaité se porter acquéreurs de l’entreprise en difficulté, ces derniers souhaitant reprendre l’entreprise et lui donner un second souffle,

 

Les consorts M ont déposé une offre de reprise de la société E auprès de l’administrateur,

 

Pour permettre cette reprise, ils ont ensuite acquis, par acte sous seing privé du 28 octobre 2013, l’ensemble des parts sociales des consorts D sous la condition de l’homologation de leur projet de reprise par le Tribunal de Commerce,

 

Cette condition était naturellement inévitable en droit de l’entreprise en difficulté,

 

Mais surtout, l’acte prévoyait également la reprise par les consorts M des engagements de caution des consorts D.

Cela était aussi la suite logique de la cession des parts,

 

Cela était parfaitement logique,

 

Il est bien évident que dans l’hypothèse où les consorts D procédaient à la cession des parts et vendaient leur entreprise, ils devaient dans le même temps se libérer de toute forme d’engagement à l’encontre d’une société qui n’était désormais plus la leur,

 

L’un n’allant pas sans l’autre,

 

Ce qui, au moment de l’acte ne semblait pas déranger les repreneurs qui avaient clairement signé l’acte de cession des parts, avec en son sein, la clause non équivoque de la reprise de l‘engagement de caution.

 

Or, comme à chacun sait, il faut savoir battre le fer pendant qu’il est encore chaud,

 

Il n’est pas rare de constater que si les actes de cession des parts prévoient le transfert du cautionnement, cela est rarement suivi d’effet, ce qui peut créer de nombreuses difficultés, comme tel est le cas en l’espèce, lorsque la banque finalement poursuit les cautions initiales.

 

C’est dans ces circonstances que, par jugement du 31 octobre 2013, le Tribunal de Commerce a autorisé la cession des parts et que par jugement du 15 janvier 2014, le même Tribunal de Commerce a arrêté le plan de continuation présenté par la société E prévoyant notamment le remboursement sur 10 ans des créances bancaires.

 

Que pour autant, malheureusement, les repreneurs n’ont pas su être à la hauteur des espérances du Tribunal de Commerce et des cédants, de telle sorte que par la suite ladite entreprise a fait l’objet d’une liquidation judiciaire,

 

La banque a alors repris ces poursuites contre la caution, savoir Monsieur D, afin de réclamer le paiement de la somme de 134 429,15 euros outre intérêts.

 

C’est dans ces circonstances que les consorts D ont tenté d’échapper à leur responsabilité en premier lieu en opposant à la banque un manquement aux obligations de proportionnalité du prêt et des engagements de caution, et également un manquement aux obligations de conseil de mise en garde,

 

Ils ont enfin opposé à la banque le fait que la cession de parts prévoyait des substituions de cautions de telle sorte qu’il appartenait aux consorts M de les garantir des sommes pour lesquelles ces derniers pourraient être condamnés.

 

Concernant la question de disproportion, la Cour vient sanctionner le cumul des engagements de caution,

 

En effet, elle souligne que le simple fait que le dirigeant déclare au titre de ses engagements un cautionnement antérieur il appartenait à la banque de vérifier si ce nouvel engagement de caution était supportable, en sus du premier,

 

A défaut, le nouvel engagement de caution était manifestement disproportionné par rapport à ses biens et revenus et ses engagements antérieurs.

 

En effet, la Cour d’Appel tirant toute conséquence de cette disproportion, souligne qu’il appartenait à la banque de démontrer que le patrimoine de Monsieur D lui permettait de faire face à ses nouvelles obligations au moment où elle l’a appelé.

 

Mais plus encore, la Cour considère que la disproportion pouvait, (et devait ?), s’apprécier au jour du jugement qui a arrêté le plan de redressement date à laquelle l’obligation de Monsieur D, dirigeant caution, est devenue exigible.

 

Enfin, et surtout, la Cour d’appel apporte une réponse à l’appel en garantie de l’ancien dirigeant dirigé contre les repreneurs de la société, les consorts M.

 

Monsieur D considérait que l’appel en garantie du nouveau porteur de parts, qui s’était engagé dans l’acte de cession de parts à reprendre les engagements de caution, était parfaitement fondé au motif pris qu’aucune action contre la caution n’avait été exercée préalablement à la cession des parts,

 

De telle sorte que l’engagement devait forcément être repris par les consorts M,

 

Pour autant, la réalité factuelle révélait que l’assignation par laquelle la banque avait pris soin de se garantir nonobstant l’arrêt des poursuites individuelles était antérieure à la cession de parts,

De telle sorte que le repreneur, Monsieur M, ne serait pas tenu par une poursuite antérieure à la cession des parts et à la reprise des engagements de caution subséquentes,

 

Monsieur D tente de s’en défendre en expliquant notamment qu’il ne fût pas informé de l’action de la banque, l’assignation du 15 octobre 2013, ne lui ayant pas été délivrée à personne, que cette assignation ne faisait pas mention d’une demande effective de l’engagement de caution qu’il a souscrite.

 

Que surtout, dans la mesure ou l’action initiale n’était que « conservatoire », l’idée de Monsieur D était de considérer que ses véritables demandes en paiement ne s’étaient exprimées que par la suite, soit, au mois d’avril 2014,

 

De telle sorte que les véritables demandes en condamnation découlant cette action était réellement survenu postérieurement à l’acte de cession des parts qui est intervenu le 28 août 2013,

 

De telle sorte que l’engagement de Monsieur M de garantir les cédants contre toute action de la part de créancier pour des faits postérieurs à la cession de parts était parfaitement valide et non équivoque.

 

Or, dans l’acte de cession qui avait été conclu entre les vendeurs de parts et les repreneurs en date du 28 août 2013 notamment sur l’article intitulé «  substitution de caution, engagement des cessionnaires »,

 

Lequel précisait qu’après avoir inventorié les créances pour lesquelles les époux D s’étaient portés caution solidaire, Monsieur M prend l’engagement de se porter caution personnelle et solidaire de la société au lieu et place des consorts D et sous les mêmes conditions à l’effet de garantir lesdits paiements et obligations et de proposer toute autre garantie acceptée par les créanciers suffisait, le tout de façon que les consorts D soient relevés de leurs engagements de caution qu’ils ont souscrit et dégagés de toute obligation à cet égard.

 

La même clause prévoyant que Monsieur M s’obligeait à garantir les cédants contre toute action de la part de chacun des créanciers susvisés pour des faits postérieurs à la cession des parts et à leur rembourser immédiatement toute somme qu’ils pouvaient être tenus de payer à ce titre.

 

La clause était-elle si claire que ca ?

 

La Cour d’appel, quant à elle, interprète cette clause en ce sens que la substitution ne jouerait qu’en cas de poursuites par des créanciers qu’elle désigne contre monsieur D en sa qualité de dirigeant caution pour des faits exclusivement postérieurs à l’acte de cession de parts.

 

Cette décision peut sembler d’autant plus curieuse que dans le corps de sa décision, la Cour, considère, au visa de l’article L622-28 alinéas 2 et 3 du Code du Commerce, que dans la mesure où le créancier bénéficie d’un cautionnement consenti par une personne physique en garantie de la dette d’un débiteur principal mis ensuite en redressement judiciaire, peut prendre des mesures conservatoires sur les biens de la caution.

 

La question se pose alors de savoir si l’assignation du 15 octobre 2013, délivrée à la requête de la banque, peut s’analyser en véritable mesure de poursuites contre Monsieur D en sa qualité de caution aux fins d’obtenir on d’un titre exécutoire même si l’instance introduite par cette assignation a été suspendue jusqu’au jugement du plan de redressement par l’effet de l’article L122-28 du Code du Commerce.

 

A bien y croire la Cour, cela semble être le cas,

 

Elle considère, ce qui peut sembler bien contestable, que la clause de substitution ne peut être invoquée à l’encontre de Monsieur M dans la mesure où l’acte de poursuite de Monsieur D, en qualité de dirigeant caution, était antérieur à la cession des parts sociales,

 

Dès lors, il y a lieu de rejeter l’appel en garantie fait par Monsieur D à l’encontre de Monsieur M.

 

Cette décision est intéressante à bien des égards.

 

En premier lieu elle rappelle que la banque ne peut cumuler les engagements de cautionnement sans exposer au dirigeant à une problématique de disproportionnalité des engagements.

 

En deuxième lieu, et surtout, elle rappelle, que dans l’hypothèse d’une cession des parts qui prévoit une substitution d’un engagement de caution par le repreneur il importe de n’oublier aucun engagement de caution et de bien s’assurer de l’efficience de la reprises desdits engagements,

 

Bien plus, il est à mon sens important d’établir cette cession des parts au contradictoire des banques partenaires afin que celles-ci soient parfaitement informés de ce transfert d’engagements de caution,

 

Idéalement, il serait bon que les cédants de parts obtiennent un accord express de la banque quant à la reprise des engagements de caution par le repreneur,

 

Sans quoi, immanquablement, l’ancien dirigeant se retrouve encore et toujours exposé à des poursuites par la banque en cas de déconfiture de l’entreprise,

 

Il est alors tout aussi contraint d’appeler en garantie le repreneur qui ne manquerait pas de faire preuve d’imagination juridique afin d’échapper à ces fameux engagements de cautionnement.

 

Sans quoi, il peut sembler bien injuste à bien des égards que ce cédant se retrouve à supporter un engagement de cautionnement après qu’il ait vendu sa société alors que justement les poursuites de la caution découlent bien souvent des erreurs ou de la mauvaise gestion, et donc de la confiture de l’entreprise qui serait du fait du nouveau repreneur.

 

Pour autant, la question de la transmission de l’engagement de caution dans le cadre d’une cession de parts ne doit surtout pas être prise à la légère,

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

 

 

 

 

 

 

Plan de sauvegarde ou de redressement et options offertes aux créanciers

Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Nîmes qui vient aborder la question spécifique du projet de plan de redressement judiciaire ou de sauvegarde dans lequel, le chef d’entreprise en difficulté fait des propositions de règlement des dettes à l’ensemble de ses créanciers.

Il convient de rappeler que le propre du redressement judiciaire ou de la sauvegarde est d’obtenir un plan pour désintéresser les créanciers sur 10 ans.

Ces procédures représentent bon nombre d’avantages car tant le redressement judiciaire que la sauvegarde arrêtent les poursuites individuelles et permettent à l’entreprise en difficulté de trouver un second souffle économique malgré les difficultés qu’il rencontre, de mieux affronter la cessation des paiements présente ou à venir et de régler ses créanciers sur 10 ans sans intérêt à l’exception des créances bancaires.

Cela permet également de recréer une phase de négociation avec les créanciers, dite négociation tantôt individuelle et tantôt collective.

Le propre du plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire est de permettre alors au chef d’entreprise en difficulté de présenter des propositions de règlement de dettes réduites au besoin.

Il convient de rappeler que le plan peut aller jusqu’à 10 ans et ne peut malheureusement dépasser cette période.

Cela est un délai assez long pour imaginer pallier à la carence d’un établissement bancaire qui se refuserait de refinancer à grand renfort d’intérêts une situation de trésorerie difficile ou une passe économique conjoncturelle difficile.

Cette procédure permet en premier lieu de bénéficier de l’arrêt des poursuites individuelles, de ne pas avoir pendant près d’un an soit deux fois 6 mois de période d’observation, voire une ultime période de 6 mois sur la seule demande du Procureur de la République, de recréer une trésorerie et par la suite de présenter un plan étant rappelé qu’in fine, la première échéance du plan a vocation à être réglée à la date anniversaire du plan homologué.

Ce n’est qu’à la fin de la première année du plan que la première échéance est due même s’il est fréquent de voir que le jugement de sauvegarde ou de redressement judiciaire invite le chef d’entreprise à verser régulièrement par mois ou par trimestre au mandataire judiciaire une partie de l’échéance pour qu’à la date anniversaire du plan afin que ce dernier puisse régler l’ensemble des créanciers.

Une des réformes de la loi du 26 juillet 2005 étant notamment, non plus de vérifier que le chef d’entreprise ait réglé l’échéance annuelle à ses créanciers mais bel et bien que l’argent demeure entre les mains du commissaire à l’exécution du plan qui a vocation, une fois par an, à régler les créanciers.

Le seul bémol relatif à ce plan de redressement judiciaire sans intérêts demeure peut être le coût des frais de justice puisque le redressement judiciaire représente un coût certain et le commissaire à l’exécution du plan a pour habitude également de prendre une quote part de frais à chaque date anniversaire du plan pour assurer le suivi du dossier.

Ce projet de plan doit être établi bien avant la fin de la période de sauvegarde ou de redressement judiciaire pour la simple et bonne raison qu’à la fin de ladite période, le plan doit être rendu ce qui amène le rédacteur du projet à imaginer remonter le temps pour pouvoir avoir un jugement rendu, un délibéré convenable, une date d’audience précédente et cela, tout en respectant le délai de consultation des créanciers car le mandataire judiciaire a l’obligation, conformément à la loi, de faire état de ces propositions à l’ensemble des créanciers qui ont 30 jours pour répondre.

L’établissement du plan de redressement judiciaire et les propositions qui s’en suivent doivent être considérées comme une opportunité économique et financière de négociation avec les créanciers pour trouver des propositions intéressantes pour les deux parties du règlement des dettes en question.

Il ressort de cet arrêt de la Cour d’Appel de Nîmes que par jugement en date du 26 juin 2013, le Tribunal de Commerce avait ouvert une procédure de sauvegarde à l’encontre d’une société.

La période d’observation avait été renouvelée et un plan de sauvegarde avait été soumis à l’ensemble des créanciers par le mandataire judiciaire et c’est dans ces circonstances que le Tribunal de Commerce avait arrêté le plan de sauvegarde de l’entreprise dans les conditions suivantes :

➢ Arrête le plan de sauvegarde organisant la continuation de l’entreprise selon la proposition du projet de plan sauf à préciser que les créanciers qui n’ont pas répondu ne peuvent se voir imposer la proposition n°1 et devront être remboursés à 100% sur 9 ans

➢ Donne acte aux créanciers de l’entreprise des délais et remises acceptés dans les conditions prévues par l’article L 626-18 du Code de Commerce

➢ Dit qu’en ce qui concerne les créanciers ayant accepté l’option 1, 25% pour solde de tout compte, ce dividende unique interviendra au plus tard le 27 mai 2016 par l’intermédiaire du commissaire à l’exécution du plan.

➢ Précise pour l’option n°2, 100% sur 9 ans que le règlement intégral du passif sera effectué auprès du commissaire à l’exécution du plan de la société sur 9 ans par échéance mensuelle, la répartition auprès des créanciers se faisant tous les ans.

➢ Dit que les dividendes seront versés entre les mains du commissaire à l’exécution du plan sous réserve d’une admission définitive.

Pour autant, la société débitrice ayant interjeté appel dudit jugement, en demandant à la Cour d’Appel de l’infirmer en ce que le Tribunal de Commerce a jugé que le plan arrêté comprenait un remboursement à 100% selon l’option 2 pour les créanciers n’ayant pas répondu à la consultation dans le délai de 30 jours et de décider que pour ces créanciers, les modalités de remboursement seraient les suivantes : un paiement pour solde de tout compte de 25% à la date anniversaire de l’adoption du plan .

Le commissaire à l’exécution du plan s’est associé à cette demande en rappelant qu’au terme de l’article L 626-5 du Code de Commerce, le défaut de réponse vaut acceptation et que dès lors les termes du projet soumis aux créanciers étaient clairs, le Tribunal pouvait en effet imposer l’option n°1 aux créanciers saisissant.

En effet, cette jurisprudence est intéressante car elle rappelle que rien n’empêche le chef d’entreprise de faire plusieurs propositions et qu’il n’y aurait pas vocation de se satisfaire nécessairement de la seule proposition de 100%sur 10 ans.

Dans la mesure où le créancier a été touché par le mandataire judiciaire, par un courrier recommandé, rien n’empêche d’imaginer affecter à une option peut être désavantageuse pour le créancier mais avantageuse pour le chef d’entreprise en difficulté de lui imposer une option dans l’hypothèse où le créancier ne répondrait pas.

A défaut de réponse, il est vrai que la pratique montre que le Tribunal de Commerce et surtout le procureur de la république qui est présent à toutes les audiences viennent à préserver les droits des créanciers au motif pris que ces derniers n’ayant pas répondu, il y aurait vocation de facto à leur fixer un remboursement de leur créance dans le cadre d’un plan à hauteur de 100% sur 9 ans.

Pour autant il n’en est rien.

Il convient de rappeler l’essence même du droit des entreprises en difficulté qui dès les réformes de 1967, 1985, 1994, 2005 ou encore 2012 vient clairement rappeler qu’il appartient aux créanciers d’être diligents dans le cadre de la procédure collective et que le chef d’entreprise en difficulté, en qualité de débiteur, a le droit de bénéficier des avantages des dispositions du droit des entreprises en difficulté qui ont vocation à le préserver, à l’empêcher de faire une faillite et une liquidation judiciaire et lui permettre de faire face à ses obligations.

Par voie de conséquences, la contestation de créance et une proposition d’option particulièrement favorable au débiteur dans le cadre d’un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire sont de mises pour justement permettre au chef d’entreprise de désintéresser les créanciers méritants ou en tout cas ceux qui sont réactifs.

Il est encore acquis qu’en pareille matière, plus le passif a vocation à être réduit comme peau de chagrin et plus le chef d’entreprise en difficulté sera à même d’y faire face et de régler les créances.

Par voie de conséquences, il est regrettable de constater que tant le procureur de la république que certains Tribunal de Commerce croient bon malmener cette philosophie législative visant à permettre au chef d’entreprise de mieux faire face aux difficultés qu’il rencontre.

Pour autant, la Cour d’Appel de Nîmes est sensible à cette approche commerciale et vient effectivement consacrer l’idée selon laquelle le créancier qui n’a pas répondu a vocation à supporter l’option choisi dans l’intérêt du chef d’entreprise en difficulté et non pas choisi par le Tribunal de Commerce dans l’intérêt éventuel du créancier qui n’a pas daigné répondre.

En effet, la Cour d’Appel dans cet arrêt considère que dès lors que les créanciers ont été parfaitement informés des conséquences du défaut de réponse aux propositions formulées lors de la consultation et notamment lors de l’option retenue dans ce cas, le Tribunal ne peut refuser de faire application de cette option.

La Cour d’Appel rappelle qu’au terme de l’article L 626-5 alinéa 2 du Code de Commerce lorsque les propositions pour le règlement des dettes portent sur des délais et remises, le mandataire judiciaire recueille l’accord de chaque créancier qui a déclaré sa créance.

Pas plus le décret du 28 décembre 2005 que la loi du 26 juillet 2005 ne règlementent le contenu de la consultation des créanciers, l’article L 626-5 alinéa 2 du Code de Commerce évoquant seulement les délais et remises proposées par le débiteur.

Bien que cette situation soit fréquente, la possibilité de propositions alternatives n’est pas prévue par le Code de Commerce, l’article L 626-5 alinéa 2 du Code de Commerce, prévoit qu’en cas de consultation par écrit, le défaut de réponse dans le délai de 30 jours, à compter de la réception de la lettre du mandataire judiciaire vaut acceptation.

Dans le souci d’améliorer les chances de redressement de l’entreprise, le législateur présume que le défaut de réponse dans le délai emporte acceptation des propositions de règlement du passif.

Ainsi le créancier qui a répondu négativement à la consultation, ne peut effectivement se voir imposer des remises de dettes mais seulement des délais (article L 626-18 du Code de Commerce), le créancier consulté qui n’a pas répondu s’expose cependant à voir son silence interprété comme l’acceptation des propositions qui lui sont faites.

En effet, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, s’il est incontestable que la renonciation à une créance admise en son principe à la suite d’une déclaration de créance ayant valeur de demande de justice ne saurait résulter d’une renonciation implicite, le créancier taisant, dès lors qu’il a été régulièrement consulté sur un projet faisant apparaître clairement les différentes propositions de règlement de dette et les conséquences du défaut de réponse des créanciers, peut se voir imposer une remise à laquelle il a tacitement consenti par son abstention.

En l’espèce, il est justifié que le projet de plan a été régulièrement adressé à l’ensemble des créanciers et notamment au créancier G qui en a accusé réception le 26 novembre 2014.

Ce projet prévoyait expressément 2 alternatives :

•  options n° 1 : règlement des créances à hauteur de 25 % pour solde de tout compte dont le paiement interviendra à la date anniversaire de l’adoption du plan par le Tribunal de Commerce

• option n° 2 : remboursement de la créance admise à hauteur de 100 % sur 9 années en 9 versements annuels, à concurrence de 5 % la 1ère année, 7,50 % la 2ème année, 10 % au titre des 4 années suivantes, 15 % pour les 7ème et 8ème année et 17,50 % la 9ème année.

Le projet de règlement des dettes adressé au créancier contenait un paragraphe abstention ou refus des créanciers rédigé comme suit «le défaut de réponse à ces propositions amènerait l’entreprise à opter pour la solution qui lui paraîtra la plus favorable, en l’espèce l’option 1, savoir paiement des créances définitivement admises à hauteur de 25 % pour solde de tout compte conformément aux dispositions légales».

Les créanciers ont donc été parfaitement informés des conséquences de leur défaut d’acceptation ou de défaut de réponse, la société précisant expressément quelle serait l’option retenue si le créancier n’acceptait pas les propositions formulées ou s’abstenait de répondre.

Il convient en conséquence de constater qu’à défaut de réponse dans le délai de 30 jours qui leur étaient impartis, les créanciers ont accepté implicitement que l’option n° 1 leur soit appliquée, avec les remises de dettes subséquentes.

Le Tribunal a donc à tort refusé de faire application de l’option1 aux créanciers n’ayant pas répondu.

De telle sorte que la Cour d’appel réforme la décision sur ce point,

Cette décision est salutaire.

Il important que le Tribunal de Commerce en ait connaissance car elle permet au débiteur de profiter de la carence ou du silence des créanciers en leur imposant des options qui sont immanquablement favorable au chef d’entreprise en difficulté et donc il appartient aux créanciers si ceux-ci n’entendent pas accepter cette proposition de se manifester.

Plan de sauvegarde ou de redressement et options offertes aux créanciers

[vc_row][vc_column][vc_column_text]Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Nîmes qui vient aborder la question spécifique du projet de plan de sauvegarde ou de plan de redressement judiciaire dans lequel, le chef d’entreprise en difficulté fait des propositions de règlement des dettes à l’ensemble de ses créanciers.

Il convient de rappeler que le propre du redressement judiciaire ou de la sauvegarde est d’obtenir un plan pour désintéresser les créanciers sur 10 ans.

Ces procédures représentent bon nombre d’avantages car tant le redressement judiciaire que la sauvegarde arrêtent les poursuites individuelles et permettent à l’entreprise en difficulté de trouver un second souffle économique malgré les difficultés qu’il rencontre, de mieux affronter la cessation des paiements présente ou à venir et de régler ses créanciers sur 10 ans sans intérêt à l’exception des créances bancaires.

Cela permet également de recréer une phase de négociation avec les créanciers, dite négociation tantôt individuelle et tantôt collective.

Le propre du plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire est de permettre alors au chef d’entreprise en difficulté de présenter des propositions de règlement de dettes réduites au besoin.

Il convient de rappeler que le plan peut aller jusqu’à 10 ans et ne peut malheureusement dépasser cette période.

Cela est un délai assez long pour imaginer pallier à la carence d’un établissement bancaire qui se refuserait de refinancer à grand renfort d’intérêts une situation de trésorerie difficile ou une passe économique conjoncturelle difficile.

Cette procédure permet en premier lieu de bénéficier de l’arrêt des poursuites individuelles, de ne pas avoir pendant près d’un an soit deux fois 6 mois de période d’observation, voire une ultime période de 6 mois sur la seule demande du Procureur de la République, de recréer une trésorerie et par la suite de présenter un plan étant rappelé qu’in fine, la première échéance du plan a vocation à être réglée à la date anniversaire du plan homologué.

Ce n’est qu’à la fin de la première année du plan que la première échéance est due même s’il est fréquent de voir que le jugement de sauvegarde ou de redressement judiciaire invite le chef d’entreprise à verser régulièrement par mois ou par trimestre au mandataire judiciaire une partie de l’échéance pour qu’à la date anniversaire du plan afin que ce dernier puisse régler l’ensemble des créanciers.

Une des réformes de la loi du 26 juillet 2005 étant notamment, non plus de vérifier que le chef d’entreprise ait réglé l’échéance annuelle à ses créanciers mais bel et bien que l’argent demeure entre les mains du commissaire à l’exécution du plan qui a vocation, une fois par an, à régler les créanciers.

Le seul bémol relatif à ce plan de redressement judiciaire sans intérêts demeure peut être le coût des frais de justice puisque le redressement judiciaire représente un coût certain et le commissaire à l’exécution du plan a pour habitude également de prendre une quote part de frais à chaque date anniversaire du plan pour assurer le suivi du dossier.

Ce projet de plan doit être établi bien avant la fin de la période de sauvegarde ou de redressement judiciaire pour la simple et bonne raison qu’à la fin de ladite période, le plan doit être rendu ce qui amène le rédacteur du projet à imaginer remonter le temps pour pouvoir avoir un jugement rendu, un délibéré convenable, une date d’audience précédente et cela, tout en respectant le délai de consultation des créanciers car le mandataire judiciaire a l’obligation, conformément à la loi, de faire état de ces propositions à l’ensemble des créanciers qui ont 30 jours pour répondre.

L’établissement du plan de redressement judiciaire et les propositions qui s’en suivent doivent être considérées comme une opportunité économique et financière de négociation avec les créanciers pour trouver des propositions intéressantes pour les deux parties du règlement des dettes en question.

Il ressort de cet arrêt de la Cour d’Appel de Nîmes que par jugement en date du 26 juin 2013, le Tribunal de Commerce avait ouvert une procédure de sauvegarde à l’encontre d’une société.

La période d’observation avait été renouvelée et un plan de sauvegarde avait été soumis à l’ensemble des créanciers par le mandataire judiciaire et c’est dans ces circonstances que le Tribunal de Commerce avait arrêté le plan de sauvegarde de l’entreprise dans les conditions suivantes :[/vc_column_text][mk_custom_list]

  • Arrête le plan de sauvegarde organisant la continuation de l’entreprise selon la proposition du projet de plan sauf à préciser que les créanciers qui n’ont pas répondu ne peuvent se voir imposer la proposition n°1 et devront être remboursés à 100% sur 9 ans
  • Donne acte aux créanciers de l’entreprise des délais et remises acceptés dans les conditions prévues par l’article L 626-18 du Code de Commerce
    Dit qu’en ce qui concerne les créanciers ayant accepté l’option 1, 25% pour solde de tout compte, ce dividende unique interviendra au plus tard le 27 mai 2016 par l’intermédiaire du commissaire à l’exécution du plan.
  • Précise pour l’option n°2, 100% sur 9 ans que le règlement intégral du passif sera effectué auprès du commissaire à l’exécution du plan de la société sur 9 ans par échéance mensuelle, la répartition auprès des créanciers se faisant tous les ans.
  • Dit que les dividendes seront versés entre les mains du commissaire à l’exécution du plan sous réserve d’une admission définitive.

[/mk_custom_list][vc_column_text]

Pour autant, la société débitrice ayant interjeté appel dudit jugement, en demandant à la Cour d’Appel de l’infirmer en ce que le Tribunal de Commerce a jugé que le plan arrêté comprenait un remboursement à 100% selon l’option 2 pour les créanciers n’ayant pas répondu à la consultation dans le délai de 30 jours et de décider que pour ces créanciers, les modalités de remboursement seraient les suivantes : un paiement pour solde de tout compte de 25% à la date anniversaire de l’adoption du plan .

Le commissaire à l’exécution du plan s’est associé à cette demande en rappelant qu’au terme de l’article L 626-5 du Code de Commerce, le défaut de réponse vaut acceptation et que dès lors les termes du projet soumis aux créanciers étaient clairs, le Tribunal pouvait en effet imposer l’option n°1 aux créanciers saisissant.

En effet, cette jurisprudence est intéressante car elle rappelle que rien n’empêche le chef d’entreprise de faire plusieurs propositions et qu’il n’y aurait pas vocation de se satisfaire nécessairement de la seule proposition de 100%sur 10 ans.

Dans la mesure où le créancier a été touché par le mandataire judiciaire, par un courrier recommandé, rien n’empêche d’imaginer affecter à une option peut être désavantageuse pour le créancier mais avantageuse pour le chef d’entreprise en difficulté de lui imposer une option dans l’hypothèse où le créancier ne répondrait pas.

A défaut de réponse, il est vrai que la pratique montre que le Tribunal de Commerce et surtout le procureur de la république qui est présent à toutes les audiences viennent à préserver les droits des créanciers au motif pris que ces derniers n’ayant pas répondu, il y aurait vocation de facto à leur fixer un remboursement de leur créance dans le cadre d’un plan à hauteur de 100% sur 9 ans.

Pour autant il n’en est rien.

Il convient de rappeler l’essence même du droit des entreprises en difficulté qui dès les réformes de 1967, 1985, 1994, 2005 ou encore 2012 vient clairement rappeler qu’il appartient aux créanciers d’être diligents dans le cadre de la procédure collective et que le chef d’entreprise en difficulté, en qualité de débiteur, a le droit de bénéficier des avantages des dispositions du droit des entreprises en difficulté qui ont vocation à le préserver, à l’empêcher de faire une faillite et une liquidation judiciaire et lui permettre de faire face à ses obligations.

Par voie de conséquences, la contestation de créance et une proposition d’option particulièrement favorable au débiteur dans le cadre d’un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire sont de mises pour justement permettre au chef d’entreprise de désintéresser les créanciers méritants ou en tout cas ceux qui sont réactifs.

Il est encore acquis qu’en pareille matière, plus le passif a vocation à être réduit comme peau de chagrin et plus le chef d’entreprise en difficulté sera à même d’y faire face et de régler les créances.

Par voie de conséquences, il est regrettable de constater que tant le procureur de la république que certains Tribunal de Commerce croient bon malmener cette philosophie législative visant à permettre au chef d’entreprise de mieux faire face aux difficultés qu’il rencontre.

Pour autant, la Cour d’Appel de Nîmes est sensible à cette approche commerciale et vient effectivement consacrer l’idée selon laquelle le créancier qui n’a pas répondu a vocation à supporter l’option choisi dans l’intérêt du chef d’entreprise en difficulté et non pas choisi par le Tribunal de Commerce dans l’intérêt éventuel du créancier qui n’a pas daigné répondre.

En effet, la Cour d’Appel dans cet arrêt considère que dès lors que les créanciers ont été parfaitement informés des conséquences du défaut de réponse aux propositions formulées lors de la consultation et notamment lors de l’option retenue dans ce cas, le Tribunal ne peut refuser de faire application de cette option.

La Cour d’Appel rappelle qu’au terme de l’article L 626-5 alinéa 2 du Code de Commerce lorsque les propositions pour le règlement des dettes portent sur des délais et remises, le mandataire judiciaire recueille l’accord de chaque créancier qui a déclaré sa créance.

Pas plus le décret du 28 décembre 2005 que la loi du 26 juillet 2005 ne règlementent le contenu de la consultation des créanciers, l’article L 626-5 alinéa 2 du Code de Commerce évoquant seulement les délais et remises proposées par le débiteur.

Bien que cette situation soit fréquente, la possibilité de propositions alternatives n’est pas prévue par le Code de Commerce, l’article L 626-5 alinéa 2 du Code de Commerce, prévoit qu’en cas de consultation par écrit, le défaut de réponse dans le délai de 30 jours, à compter de la réception de la lettre du mandataire judiciaire vaut acceptation.

Dans le souci d’améliorer les chances de redressement de l’entreprise, le législateur présume que le défaut de réponse dans le délai emporte acceptation des propositions de règlement du passif.

Ainsi le créancier qui a répondu négativement à la consultation, ne peut effectivement se voir imposer des remises de dettes mais seulement des délais (article L 626-18 du Code de Commerce), le créancier consulté qui n’a pas répondu s’expose cependant à voir son silence interprété comme l’acceptation des propositions qui lui sont faites.

En effet, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, s’il est incontestable que la renonciation à une créance admise en son principe à la suite d’une déclaration de créance ayant valeur de demande de justice ne saurait résulter d’une renonciation implicite, le créancier taisant, dès lors qu’il a été régulièrement consulté sur un projet faisant apparaître clairement les différentes propositions de règlement de dette et les conséquences du défaut de réponse des créanciers, peut se voir imposer une remise à laquelle il a tacitement consenti par son abstention.

En l’espèce, il est justifié que le projet de plan a été régulièrement adressé à l’ensemble des créanciers et notamment au créancier G qui en a accusé réception le 26 novembre 2014.

Ce projet prévoyait expressément 2 alternatives :[/vc_column_text][mk_custom_list style= »mk-icon-gear »]

  • options n° 1 : règlement des créances à hauteur de 25 % pour solde de tout compte dont le paiement interviendra à la date anniversaire de l’adoption du plan par le Tribunal de Commerce
  • option n° 2 : remboursement de la créance admise à hauteur de 100 % sur 9 années en 9 versements annuels, à concurrence de 5 % la 1ère année, 7,50 % la 2ème année, 10 % au titre des 4 années suivantes, 15 % pour les 7ème et 8ème année et 17,50 % la 9ème année.

[/mk_custom_list][vc_column_text]Le projet de règlement des dettes adressé au créancier contenait un paragraphe abstention ou refus des créanciers rédigé comme suit «le défaut de réponse à ces propositions amènerait l’entreprise à opter pour la solution qui lui paraîtra la plus favorable, en l’espèce l’option 1, savoir paiement des créances définitivement admises à hauteur de 25 % pour solde de tout compte conformément aux dispositions légales».

Les créanciers ont donc été parfaitement informés des conséquences de leur défaut d’acceptation ou de défaut de réponse, la société précisant expressément quelle serait l’option retenue si le créancier n’acceptait pas les propositions formulées ou s’abstenait de répondre.

Il convient en conséquence de constater qu’à défaut de réponse dans le délai de 30 jours qui leur étaient impartis, les créanciers ont accepté implicitement que l’option n° 1 leur soit appliquée, avec les remises de dettes subséquentes.

Le Tribunal a donc à tort refusé de faire application de l’option1 aux créanciers n’ayant pas répondu.

De telle sorte que la Cour d’appel réforme la décision sur ce point,

Cette décision est salutaire.

Il important que le Tribunal de Commerce en ait connaissance car elle permet au débiteur de profiter de la carence ou du silence des créanciers en leur imposant des options qui sont immanquablement favorable au chef d’entreprise en difficulté et donc il appartient aux créanciers si ceux-ci n’entendent pas accepter cette proposition de se manifester.[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]