Expertise judiciaire contre un promoteur et péremption d’instance

Laurent Latapie Avocat

Dans le cadre d’un VEFA, la participation active à une expertise judiciaire suffit-elle à interrompre les délais de péremption ou de prescription pour tout recours, ou expose t’elle le propriétaire pour un lot privatif, ou bien encore le syndicat des copropriétaires pour les parties commune à une péremption d’instance ou à une prescription suivant les conditions dans laquelle il a également engagé une action au fond contre le promoteur ?

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Résidence principale, entre titre exécutoire et insaisissabilité

Laurent latapie avocat tribunal aix
Laurent latapie avocat tribunal aix

Un créancier non professionnel, la banque ayant financé la résidence principale faisant l’objet d’une déclaration d’insaisissabilité, peut-il saisir ladite résidence principale après la clôture pour insuffisance d’actif du débiteur en liquidation judiciaire ? A t’il besoin d’un titre exécutoire ?

Article :

Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu par la Cour de Cassation en ce mois de septembre 2018 relatif à l’inopposabilité de la déclaration d’insaisissabilité de la résidence principale dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation rappelle que le créancier, auquel la déclaration d’insaisissabilité est inopposable, bénéficie, indépendamment de ses droits dans la procédure collective de son débiteur, d’un droit de poursuite sur la résidence principale, qu’il doit être en mesure d’exercer en obtenant, s’il n’en détient pas un auparavant, un titre exécutoire par une action contre le débiteur tendant à voir constater l’existence, le montant et l’exigibilité de sa créance.

Dès lors, le principe établi, il appartient au débiteur de réfléchir à la stratégie dans laquelle ce dernier doit envisager le sort de sa résidence principale, à trois moments clés de la procédure collective: avant, pendant et après.

Mais reprenons d’abord les faits de l’espèce.

Dans cette affaire, par un acte notarié du 30 décembre 2010, Monsieur Y avait déclaré sa résidence principale insaisissable, avant d’être mis en liquidation judiciaire le 9 décembre 2011.

La banque, qui avait consenti au débiteur un prêt pour en faire l’acquisition, l’avait assigné aux fins de voir juger que, détenant une créance antérieure à la publication de la déclaration d’insaisissabilité, elle était en droit de poursuivre le recouvrement de cette créance seulement sur l’immeuble insaisissable et que la décision de justice à intervenir vaudrait titre exécutoire contre le débiteur, mais seulement aux fins de sûretés ou de voies d’exécution sur cet résidence principale ou tout bien subrogé.

La Cour d’Appel a rejeté les prétentions de la banque qui s’est pourvue en cassation et la Cour de Cassation a cassé et annulé l’arrêt en toutes ses dispositions.

En effet, avant toute chose la haute juridiction rappelle qu’il a été fourni dans les débats, à la fois la production du contrat de prêt en date du 24 novembre 2009, et à la fois la production de la déclaration d’insaisissabilité de l’immeuble constituant la résidence principale de Monsieur Y laquelle déclaration est en date du 30 décembre 2010.

De telle sorte que les droits de la banque n’étaient pas nés postérieurement à la publication de la déclaration d’insaisissabilité à l’occasion de l’activité professionnelle de Monsieur Y, mais bien avant.

Ceci fait, il ressort également des circonstances de la cause que le mandataire liquidateur désigné avait informé la banque, par courrier du 9 avril 2014, que la liquidation judiciaire de Monsieur Y avait été clôturée pour insuffisance d’actif par jugement du 29 janvier 2014.

L’article L. 643-11 du Code de Commerce rappelle, quant à lui, que « le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l’exercice individuel de leurs actions contre le débiteur ».

Cependant, ce texte prévoit diverses exceptions permettant aux créanciers de recouvrer le droit de poursuite individuelle qu’ils ne pouvaient cependant exercer sans avoir obtenu de titre exécutoire, que si leur créance avait été admise, ils pouvaient obtenir un titre exécutoire par le président du Tribunal de Commerce ou, s’ils en détenaient un de faire constater qu’ils remplissaient les conditions prévues par le texte et que si leur créance n’avait pas été vérifiée, ils devaient mettre en œuvre leur droit de poursuite dans les conditions de droit commun.

Le débiteur, quant à lui, considérait que la banque ne pouvait saisir la résidence principale car la créance est intégrée à la procédure collective et que le jugement de clôture pour insuffisance d’actif entrainait la purge du passif.

Ce qui eut payé ne paye plus…

Désormais, le créancier bénéficiant d’un droit sur un bien immobilier peut passer outre la déclaration d’insaisissabilité du bien pour le saisir.

La Cour de Cassation considère que le créancier dont la créance est née antérieurement à la publication d’une déclaration d’insaisissabilité d’un bien de son débiteur, ne peut se voir opposer cette déclaration d’insaisissabilité et a donc le droit de poursuivre individuellement la réalisation dudit bien, nonobstant l’éventuelle ouverture ultérieure d’une liquidation judiciaire à l’encontre du débiteur, et nonobstant sa clôture par la suite.

De telle sorte que la Cour d’Appel, qui a relevé l’antériorité de la créance de la banque à la publication de la déclaration d’insaisissabilité et a du reste expressément retenu l’inopposabilité consécutive de cette déclaration à la banque, mais qui a néanmoins retenu l’absence de droit de celle-ci de demander la réalisation du bien, a refusé de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l’article L.526-1 du Code de Commerce.

La Cour de Cassation considère qu’en se déterminant de la sorte, la Cour d’Appel a entravé l’exercice, par un créancier antérieur à la publication de la déclaration d’insaisissabilité.

Elle estime qu’en retenant que l’inopposabilité de la déclaration d’insaisissabilité à la banque ne donnait pas à cette dernière le droit de saisir le bien si elle ne remplissait pas les conditions prévues par le régime légal de la liquidation judiciaire pour la poursuite de l’exécution forcée de sa créance, la Cour d’appel a violé l’article L643-11 du Code du commerce car lesdites conditions légales sont étrangères à la situation du créancier à qui la déclaration d’insaisissabilité n’est pas opposable.

La Cour de Cassation finit son raisonnement par un attendu de principe dans lequel elle précise qu’ il résulte des articles L. 526-1 du Code de Commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, et L. 111-2 du Code des Procédures Civiles d’Exécution que le créancier auquel la déclaration d’insaisissabilité est inopposable bénéficie, indépendamment de ses droits dans la procédure collective de son débiteur, d’un droit de poursuite sur cet immeuble, qu’il doit être en mesure d’exercer en obtenant, s’il n’en détient pas déjà un, un titre exécutoire par une action contre le débiteur tendant à voir constater l’existence de sa créance et son exigibilité.

Or, elle pose clairement la question du sens à donner au titre exécutoire.

Cette jurisprudence est intéressante car elle précise clairement que le créancier auquel la déclaration d’insaisissabilité est inopposable bénéficie, indépendamment de ses droits dans la procédure collective de son débiteur, d’un droit de poursuite sur cet immeuble même lorsque le débiteur fait l’objet d’une liquidation judiciaire.

Mais surtout, cette jurisprudence précise que le créancier est en droit d’exercer un droit de poursuites par une action contre le débiteur cela signifie que si le créancier a déclaré sa créance au passif et que ce dernier n’a pas été vérifié ni déposé, celle-ci ne peut emporter droit à créance et qu’il lui appartient d’assigner en paiement afin de faire constater l’existence et le montant de l’exigibilité de la créance.


Car il est bien évident que la seule demande de reprise des poursuites devant le juge commissaire ne saurait suffire à emporter titre exécutoire,

Surtout, cela ne permettrait même pas au débiteur de contester la créance tant dans son montant que dans son principe, ce qui est d’autant plus regrettable quand on sait ô combien les créanciers, et plus particulièrement les banques, majorent leurs créanciers d’intérêts frais et pénalités diverses et variées,

Il apparait donc important dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire mais bien plus encore d’un redressement judiciaire de contester les créances pour envisager de remettre en question l’exigibilité et surtout le montant de la créance.

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

Cahier des charges d’un lotissement, de la Loi ALUR à la Loi ELAN

Réflexion sur le sort juridique du cahier des charges d’un lotissement, alors que la disparition programmée pour mars 2019 de tous les cahiers des charges des lotissements autorisés depuis 1977 n’aura donc pas lieu, la Loi ELAN de novembre 2018 confirmant que le cahier des charges continuera donc à régir les relations entre les colotis. Bien plus, la Loi ELAN apport des modifications permettant de voir les parties communes modifiées sans vote à l’unanimité.

Article:

Il convient de s’interesser au régime juridique du cahier des charges d’un lotissement, alors même que la notion a évolué entre la Loi ALUR de 2014 et la récente Loi ELAN de novembre 2018.

En effet, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite loi ALUR) du 24 mars 2014, entrée en vigueur le 26 mars 2014, a posé le principe de la caducité des règles d’urbanisme propres aux lotissements, à l’expiration d’un délai de dix ans à compter de la délivrance de l’autorisation de lotir.

Rappelons d’abord la différence entre règlement d’un lotissement et cahier des charges:

*Le règlement du lotissement contient des règles opposables aux autorisations d’urbanisme (Ex: limitation de la hauteur, des espaces verts etc….).

C’est un document administratif puisque validé par l’Administration lors de l’obtention du permis d’aménager.

 *Le cahier des charges est un document contractuel opposable uniquement  aux colotis entre eux. (Ex: choix d’essences pour la végétation des clôtures,couleurs imposés pour les menuiseries).

C’est un document de droit privé.


Par la loi ALUR, le législateur a voulu prévoir la caducité des règles contractuelles des cahiers des charges non approuvés (c’est-à-dire pour les lotissements postérieurs à 1978) qui ont pour objet ou pour effet d’interdire ou de restreindre le droit de construire ou encore d’affecter l’usage ou la destination de l’immeuble, car il considère qu’il s’agit de règles d’urbanisme.

Les lotissements pouvaient éviter la caducité automatique à la condition que, dans un délai de 5 ans à compter du 26 mars 2014, ledit cahier des charges ait fait l’objet d’une publication au bureau des hypothèques ou au livre foncier décidée par les colotis conformément à la majorité définie à l‘article L. 442-10 du code de l’urbanisme.

Mais les années passant, la Loi ALUR est apparue comme difficilement lisible et applicable. 

Les magistrats n’ont eu de cesse depuis 5 ans de réaffirmer la force de loi des cahiers des charges, tout du moins pour son côté contractuel gérant les relations entre colotis.

Par un arrêt du 13 octobre 2016, n°15-23674, la Cour de Cassation a jugé qu’un cahier des charges d’un lotissement, « approuvé ou non » et « quelle que soit sa date », restait la loi des parties et pouvait fonder une action en démolition des constructions irrégulières :

« Mais attendu que les clauses du cahier des charges d’un lotissement, quelle que soit sa date, approuvé ou non, revêtent un caractère contractuel et engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues ; qu’ayant exactement retenu que les clauses du cahier des charges, opposables sur le plan contractuel aux colotis, restaient applicables dans leurs rapports entre eux nonobstant le plan local d’urbanisme en vigueur, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a déduit à bon droit que tout coloti pouvait demander au juge le respect du cahier des charges sans avoir à justifier d’un préjudice et a légalement justifié sa décision de ce chef ».


Cet arrêt est le dernier d’une série de trois arrêts rendus en 2016, par lesquels la Cour de Cassation a réfuté toute caducité des dispositions inscrites dans les cahiers des charges des lotissements (pour les précédents arrêts, Cour de Cassation, 29 septembre 2016, n°15-22414 et 15-25017 ; Cour de Cassation, 21 janvier 2016, n°15-10566).


Mais également dans une décision de 2017, la Cour de cassation par l’arrêt . Civ. 3°, 14 septembre 2017, (RDI, 11/17, p. 548) a réaffirmé:

« Qu’en statuant ainsi, alors que le cahier des charges d’un lotissement, quelle que soit sa date, approuvé ou non, constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues, la cour d’appel a violé les textes susvisés »

Il est apparu de plus en plus nécessaire pour le législateur de clarifier la loi ALUR.

C’est chose faite avec la Loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique dite loi ELAN.

Après un amendement sénatorial ayant mis en avant la fragilité constitutionnelle au regard du principe de liberté contractuelle engendrée par la Loi de 2014, en particulier du droit au maintien des conventions légalement formées, les trois derniers alinéas de l’art. L 442-9 du Code de l’urbanisme sont tout simplement supprimés.

Ainsi, la disparition programmée pour mars 2019 de tous les cahiers des charges des lotissements autorisés depuis 1977 n’aura donc pas lieu.

Le cahier des charges continuera donc à régir les relations entre les colotis.

Ce qui peut sembler rassurant pour les colotis qui veulent protéger l’harmonie, le charme et l’intégrité de leur lotissement,

Mais que change la loi ELAN pour les colotis?

Outre le maintien des cahiers des charges, dorénavant les parties communes pourront voir leur affectation modifiée sans vote à l’unanimité.

Grâce à la suppression du 2eme alinéa de l’article L442-10 du code de l’urbanisme, c’est la règle de la double majorité qui s’appliquera à savoir la moitié des propriétaires détenant ensemble les deux tiers au moins de la superficie d’un lotissement ou les deux tiers des propriétaires détenant au moins la moitié de cette superficie.

Ainsi des espaces verts délaissés pourront se voir modifié en espaces urbanisables changeant de fait la physionomie des lotissements sans que la majorité absolue soit nécessaire.

Cependant, toute modification du cahier des charges pouvant se faire par vote, il appartient à chacun des colotis d’appréhender les conséquences de chaque vote pour éviter que le cahier des charges se vide de sa substance et que l’harmonie, le charme ou la spécificité de tel ou tel lotissement ne perde ses attraits,

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

Cahier des charges de lotissement et contestation d’un projet de construction

Il convient de s’intéresser à la portée juridique du cahier des charges au sein d’un lotissement qui bénéficie également d’un règlement de lotissement. Le cahier des charges constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis pour toutes les stipulations qui y sont contenues. 

Article :

Il convient de s’intéresser à la portée juridique du cahier des charges au sein d’un lotissement qui bénéficie également d’un règlement de lotissement.

Comme à chacun sait, le règlement de lotissement est un document qui émane de l’aménageur.

Ce document n’a pas vocation à régir les relations entre propriétaires, mais plutôt à compléter les règles d’urbanisme déjà en vigueur sur une une commune en les rendant souvent plus contraignantes dans le périmètre du lotissement.

Ce document s’impose à tous les colotis.

Sa validité n’est pas infini puisqu’elle cesse de s’appliquer 10 ans après la délivrance de l’autorisation de lotir.

Cependant, des dérogations étaient possibles et permettait toutefois de demander le maintien du règlement.

La loi Alur du 24 mars 2014 a pourtant supprimé ce droit.


Par contre le sort juridique n’est pas le même concernant le cahier des charges,


En effet, le cahier des charges est, quant à lui, un document de nature contractuelle et d’ordre privé.

Il s’agit d’un document rédigé par le lotisseur lui-même.

À la différence du règlement, le cahier des charges définit les droits et les obligations de chacun.

Ainsi, les règles et les servitudes qu’il contient sont destinées à régir les relations entre les propriétaires et entre le lotisseur et les acquéreurs de lots.

Le code de l’urbanisme ne prévoit aucune limite dans la durée de vie du cahier des charges.

Il en découle donc que le cahier des charges peut potentiellement continuer de produire ses effets au-delà de 10 ans.


Il n’est pas rare de constater que les lotisseurs imbriquent souvent  ces deux documents, ce qui tend souvent à complexifier la situation.

En effet, la pratique a eu tendance à intégrer dans le cahier des charges des règles d’urbanisme afin de tenter d’obtenir la préservation de l’application des mesures au-delà de 10 ans.

Le règlement devenant alors caduc une fois ce délai dépassé, les lotisseurs ont donc tenté de reproduire tout ou partie du règlement de lotissement dans le cahier des charges afin que les dispositions continuent de s’appliquer au-delà.


Cependant, par un arrêt récent, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler le principe selon lequel un cahier des charges « constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis pour toutes les stipulations qui y sont contenues ». 

Après avoir rappelé ce principe, la Cour de cassation a refusé de transmettre une question préjudicielle afin de déterminer si cette clause constituait ou non une règle d’urbanisme susceptible d’être devenue caduque. (Cass., 3ème Civ., 21 janvier 2016, n°15-10.566).


Le législateur est donc intervenu afin d’éviter les dérives opérées.

Ainsi, la loi Alur a imposé la suppression, d’ici le 26 mars 2019, de toutes les clauses non réglementaires des cahiers de charges lorsqu’elles ont pour objet de limiter le droit à construire.

Tout serait nettement plus simple si les clauses non réglementaires étaient clairement définies car la difficulté de les identifier et de les qualifier conduit à une situation d’attente de la mise en place d’un droit jurisprudentiel.

En effet la Cour d’appel d’Aix en Provence, dans une décision de Mai 2016 a pris acte des modifications apportées par la loi ALUR, entrainant par là même la caducité de l’ensemble des règles d’urbanismes des documents de lotissement,

La Cour considère cependant que des servitudes du cahier des charges, ayant trait à des zones non aedificendi et non altius, restreignant pourtant le droit de propriété, ne sont pas des règles d’urbanisme susceptibles d’être frappées de caducité.

Cette jurisprudence validant ainsi le maintien et la validité du cahier des charges,

Dans un autre décision du 31 mars 2016, Cour d’appel Aix en Provence, la haute juridiction a refusé de qualifier de « règle d’urbanisme » un chapitre du cahier des charges relatif aux constructions (surface minimum, implantation par rapport aux voies et zones non aedificandi, limites séparatives, hauteur maximum etc..),

Il est aussi vrai que d’autres exemples vont dans le sens inverse,


Dans une récente affaire portée devant la cour d’appel de Caen, du 3 Mai 2016, le maire d’une commune a supprimé, par arrêté municipal, les règles d’urbanisme du cahier des charges d’un lotissement en application de la loi ALUR, sur demande des 2/3 des propriétaires possédant la moitié des terrains.


Dans ce cas d’espèce, le maire avait supprimé des dispositions limitant la superficie d’une construction (alors qu’elles ont été considérées comme des dispositions privées régissant les rapports entre colotis dans l’affaire de la cour de cassation du 21 Janvier 2016 !)


La cour d’appel, incompétente pour statuer sur la légalité de cet arrêté municipal, n’a pu que prendre acte de cette suppression, fruit de la volonté de la majorité des colotis.

Dans la mesure où il respecte les dispositions du PLU en vigueur dans leur commune, les risques d’aboutissement d’une procédure du voisinage au niveau du cahier des charges, bien que toujours existants, sont minimes.

Il convient malgré tout de bien faire attention à vérifier le respect du projet vis à vis du code civil en ne créant pas de vue directe sur le fond voisin, faire perdre un ensoleillement ou une vue dépréciant la propriété des voisins.

En tout état de cause si le voisinage souhaite malgré tout intenter une action contre votre projet, ils devront justifier que le projet leur cause un préjudice direct dans les conditions d’occupations du bien concerné.

Il importe de préciser que si les deux conditions en prérequis de la contestation restent les mêmes, le Conseil d’État ajoute que l’auteur du recours contre une autorisation d’urbanisme doit démontrer son intérêt à agir, et le faire précisément.

Autrement dit, si un voisin conteste un projet de construction, il doit apporter une preuve tangible de l’atteinte à ses intérêts.

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

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Vente en viager, incendie et liquidation judiciaire

Cas d’école d’une vente en viager, lorsque le crédirentier engage une action aux fins de constater l’acquisition de la clause résolutoire. Parcours procédural semé d’embuches, surtout lorsque le bien immobilier a subi un incendie et que le débirentier se retrouve en liquidation judiciaire.

Article :

Il convient de s’intérresser à un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Caen en ce début d’année 2018 qui vient aborder la problématique d’une vente en viager dans laquelle le credirentier a engagé une action aux fins de constater l’acquisition de la clause résolutoire alors même que le bien avait fait l’objet d’un incendie et que le débiteur était en liquidation judiciaire.

Dans cette affaire, par acte authentique du 8 février 2012, Monsieur H né en 1950 célibataire et sans enfant propriétaire de son bien avait cédé, par le biais d’une vente en viager, à Monsieur P un ensemble immobilier comprenant une maison d’habitation, dépendances et jardin sous forme viagère, le vendeur se réservant la jouissance de l’usufruit sa vie durant et l’acquéreur devant s’acquitter d’une rente annuelle de 12 640,81 euros sans qu’il soit prévu une somme immédiatement exigible et plus connue sous le nom de « bouquet ».

Seule la rente annuelle était due.

A la suite d’un signalement auprès du Procureur de la République faisant état d’abus de faiblesse sur la personne du vendeur, le Juge des tutelles a été saisi aux fins d’ouverture d’une mesure de protection à l’égard de Monsieur H.

Par jugement en date du 28 avril 2014, le Juge des tutelles de Caen a placé Monsieur H sous curatelle renforcée désignant une association tutélaire en qualité de curateur.

L’association s’est aperçue que Monsieur P n’effectuait aucun versement postérieurement à celui effectué à la signature de l’acte qui devait correspondre de prime abord à la première annuité.

Pour cette dernière, il y avait matière à remettre en question cette vente en viager,

C’est dans ces circonstances qu’un commandement de payer visant la clause résolutoire a été signifié le 29 décembre 2015 à Monsieur P débirentier lui enjoignant de payer dans le délai d’un mois la somme de 17 882,57 euros au titre de la rente viagère, de remettre en état les dépendances et les meubles qui avaient été détruits entre temps par un incendie.

Par acte d’huissier en date du 8 mars 2016, l’association a fait assigner Monsieur P devant le Tribunal d’Instance pour :

Un premier jugement a été rendu le 27 juin 2016 assorti de l’exécution provisoire,

Cependant ce n’était pas la la seule procédure,

En effet, par jugement du 8 juillet 2016, le Tribunal de Grande Instance de Caen a prononcé la résolution du plan d’apurement du passif de Monsieur P et une procédure de liquidation judiciaire en fixant la date de cessation des paiements au 10 mars 2016.

Le mandataire liquidateur qui a été désigné a immédiatement fait appel du jugement querellé concernant cette problématique de vente en viager.

Or, par la suite, la procédure collective a évolué puisque par ordonnance de référé du 7 février 2017, le Premier Président de la Cour d’Appel a suspendu l’exécution provisoire attachée au jugement du 27 juin 2016.

Par arrêt du 27 avril 2017, la Cour d’Appel de Caen a infirmé le jugement du 8 juillet 2016 et dit « n’y avoir lieu à l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de Monsieur P. »

Or, dans cette affaire, concernant la remise en question de la vente en viager, la problématique tournait autour de 3 axes.

Premièrement, l’appel du mandataire liquidateur était-il recevable puisque c’est lui qui avait engagé l’appel et non pas Monsieur B ?

Deuxièment, la clause résolutoire de cette vente en viager était elle acquise ?

Troisiemement, y avait-il matière à ordonner la remise en état ?

Concernant l’appel de la liquidation judiciaire, il importe de préciser que concernant la régularité de la procédure, la Cour d’Appel relève qu’il est constant que Monsieur P n’était pas encore placé en liquidation judiciaire lorsque le jugement du 27 juin 2016 a été rendu mais lorsque l’appel a été interjeté le 19 aout 2016, Monsieur P était alors bel et bien en liquidation judiciaire.

Seul le liquidateur pouvait effectivement régulariser l’appel.

Il convient de rappeler qu’en cas de liquidation judiciaire, le débiteur est en effet déssaisi par la décision prononçant la liquidation judiciaire de telle sorte que c’est le liquidateur qui exerce tous les droits et actions concernant son patrimoine durant toute la durée de la procédure.

Il en va de même concernant les problématiques liées à une vente en viager,

Dans le cadre de cette procédure, concernant la question de l’acquisition de la clause résolutoire, Monsieur P s’est d’abord contenté d’affirmer qu’il rencontrait des difficultés économiques et avait fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire ayant abouti à un plan d’apurement du passif et que de difficultés complémentaires l’avaient empêché de faire face aux annuités du plan mais également au versement de la rente annuelle.

Monsieur P précisait que la réformation du jugement l’ayant placé en liquidation judiciaire lui permettrait d’apurer sa dette envers Monsieur H et il s’estimait être débiteur malheureux et de bonne foi.

Il ajoutait avoir toujours eu l’intention de remettre les lieux en l’état.

Il n’en demeure pas moins que la Cour d’Appel a une approche particulièrement sévère,

Dans un premier temps elle souligne qu’il résulte des pièces produites que la rente viagère à la charge de Monsieur P n’a plus été payée depuis le mois d’août 2014 alors même que ce paiement constitue l’obligation principale de l’appelant.

Puis, elle souligne que le délai imparti par le commandement de payer visant la clause résolutoire inscrite au contrat qui avait été délivré le 29 décembre 2015 était largement expiré lorsque Monsieur H a saisi le Tribunal de Grande Instance en demande de résolution de la vente.

Dès lors, pour la Cour, il convenait d’appliquer la clause qui précisait « qu’à défaut de paiement à son exacte échéance, d’un seul terme de la rente viagère présentement constituée, la présente vente sera de plein droit et sans mise à demeure préalable, purement et simplement résolue sans qu’il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire, un mois après un simple commandement de payer demeuré infructueux contenant déclaration par le crédirentier de son intention d’user du bénéfice de la présente clause.

Dans ce cas toutes les sommes perçues par le vendeur (bouquets et les arrérages de rente) seront de plein droit définitivement acquises au crédirentier sans recours ni répétition de la part de l’acquéreur défaillant à titre de dommages intérêts et d’indemnités forfaitairement fixés. »

Enfin, concernant la problématique relative à l’incendie, la Cour retient qu’il est établi et incontesté que les lieux objets de la vente ont été sinistrés par un incendie qui a endommagé gravement le garage, l’ancienne charretterie, les écuries ce qui a valu à Monsieur P de recevoir de son assureur une indemnisation substantielle de près de 147 000 euros qu’il a toutefois omis de consacrer à la remise en état qui s’imposait, malgré la sommation délivrée le 27 décembre 2015.

La Cour d’Appel ne répond pas vraiment sur la problématique de l’incendie puisqu’elle ne fait que trancher la difficulté relative au fait que la vente en viager aurait été litigieuse au motif pris de l’absence totale de bouquet qui découlerait d’un état de vulnérabilité.

Dès lors, s’il y avait bel et bien vulnérabilité il y avait donc vice du consentement et dans ce cas, il fallait plutôt que de prononcer la résolution judiciaire du contrat de vente en viager envisager sa nullité.

A mon sens, cela aurait été plus efficace.

Cette décision mérite malgré tout réflexion car la problématique de l’injonction de remise en état des dépendances n’est absolument pas abordée par la Cour,

En effet, celle-ci ne fait que reprendre les faits sans réellement réflechir à l’impact que cela pourrait avoir sur la nullité ou la résolution de cette vente en viager et savoir si oui ou non cela devait finalement peser sur les épaules du crédirentier ou du débirentier.

Enfin, c’est omettre l’impact de la procédure collective qui a malgré tout un sens,

En effet, la question se pose malgré tout de savoir si en l’état de la liquidation judiciaire, la demande en résolution du contrat se heurterait pas valablement aux effets automatiques de ladite liquidation.

En effet, dans la mesure où il y a l’ouverture d’une liquidation judiciaire pour lequel est attaché le principe d’interdiction des poursuites, cela devrait mettre suffisamment à mal l’idée même d’une demande de constatation de résolution du contrat par application d’une clause résolutoire.

Une jurisprudence dominante considère qu’à partir du moment où la clause a produit ses effets avant le jugement d’ouverture, il est possible pour le Juge de constater la résolution de plein droit nonobstant l’ouverture de la procédure collective.

Sauf que dans l’hypothèse où appel a été interjeté la décision n’est pas définitive et par voie de conséquences, la Cour d’Appel n’aurait plus rien à constater.

Il importe d’ailleurs de préciser que cette solution a déjà été appliquée dans le cadre quasi identique d’une clause résolutoire insérée dans un contrat de vente en viager.

En effet, bon nombre de juridictions considèrent que le jeu de la clause résolutoire doit être écarté tant que la résolution n’a pas été constatée par une décision de justice à la date d’ouverture de la procédure collective.

La Cour de Cassation a consacré plusieurs fois cette thèse notamment par un arrêt de la 3ème Chambre Civile du 18 septembre 2012.

De prime abord, dans notre affaire, cela ne serait pas possible car la créance est apparue alors que Monsieur P était déjà en plan de redressement,

Bien plus, s’il est vrai que la liquidation judiciaire a été prononcée, celle-ci a très rapidement fait l’objet d’une rétractation par la Cour de telle sorte que l’arrêt des poursuites individuelles lié à l’ouverture de la procédure collective n’aurait de toute façon plus de sens.

Pour autant, cette jurisprudence étudiée est interressante puisqu’elle vient aborder cette  problématique spécifique quant à la question de l’acquisition de la clause résolutoire avant l’ouverture de la procédure collective nonobstant le fait que la décision ne serait pas définitive.

Cela permettait à Monsieur P de garder la propriété du bien,

Cette solution serait également rassurante pour les créanciers car il est bien évident que si Monsieur P, qui est en plan de redressement, se heurte à des difficultés de paiement et ne peux plus tenir son plan, il sera alors placé en liquidation judiciaire et l’actif ne serait alors plus garanti.

Vente en viager, ou pas.

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

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Contradiction entre l’état descriptif de division et le règlement de copropriété

Un copropriétaire souhaite transformer un local d’habitation situé au 2ème étage d’un immeuble en local professionnel en y apposant sa plaque. Le syndic peut-il s’y opposer, même si le règlement de copropriété ne prévoit rien à ce sujet, au motif pris que l’état descriptif de division, qui a une valeur contractuelle, est beaucoup plus restrictif sur cette question ?

 

Article :

 

Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu par la Cour de Cassation du mois de juillet 2017 et qui vient aborder la problématique spécifique de la contradiction pouvant exister au sein d’une copropriété entre l’état descriptif de division et le règlement de copropriété en tant que tel.

 

En effet, dans cette affaire la question se pose plus particulièrement de déterminer la force juridique de l’état descriptif de division lorsque d’une part, il s’est vu conférer valeur contractuelle et lorsque, d’autre part, ces mentions ne sont pas nécessairement en contradiction avec les stipulations du règlement de copropriété,

 

La Haute Juridiction reconnait donc que lorsque les parties lui ont donné une telle nature contractuelle celle-ci doit recevoir sa pleine application.

 

Dans cette affaire la société P, propriétaire d’un lot composé d’un appartement situé au 2ème étage d’un immeuble en copropriété a assigné le syndicat des copropriétaires en annulation de la décision d’Assemblée Générale lui ayant refusé l’autorisation d’apposer des plaques professionnelles.

 

Dans cette même procédure le Syndicat des Copropriétaires sollicitait, quant à lui, qu’il soit constaté qu’en vertu du règlement de copropriété les locaux situés au 2ème étage ainsi qu’aux étages supérieurs ne pouvaient être occupés à titre professionnel.

 

Or, une contradiction était clairement constatée dans la procédure entre l’état descriptif de division et le règlement de copropriété lequel n’imposait aucune restriction particulière pour le copropriétaire de transformer, au besoin, ses locaux.

 

Ceci, d’autant plus que si le Syndicat des Copropriétaires venait opposer la force de l’état descriptif de division il n’en demeurait pas moins que le règlement de copropriété stipulait clairement que l’immeuble était destiné à un usage professionnel, de bureaux commerciaux et d’habitations en ce qui concerne les locaux situés aux étages et aux combles,

 

De telle sorte qu’au sens des articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965, rien n’empêchait le propriétaire des lots d’en jouir et d’y apposer une plaque professionnelle.

 

Le copropriétaire, la société P, considérait que le règlement de copropriété ne pouvait pas imposer de restriction aux droits des copropriétaires et que ces derniers avaient le droit d’user librement des parties privatives comprises en son lot, qu’importe ce que pouvait préciser l’état descriptif de division,

 

Ceci d’autant plus que rien, au sens du règlement de copropriété, n’y interdisait d’y apposer une plaque professionnelle.

 

Pour autant, le syndicat des copropriétaires tenait une position juridique différente,

 

L’article 8 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que : « l’état descriptif de division dont chaque propriétaire avait connaissance et accepté les termes avait la même valeur contractuelle que le règlement lui-même ».

 

L’état descriptif de division détermine l’affectation particulière de chaque lot dépendant d’un groupe de bâtiments que son propriétaire s’oblige à respecter.

 

Qu’il s’en suit que les copropriétaires de la copropriété ont entendu conférer, par des dispositions spéciales du règlement de copropriété, une valeur contractuelle à l’état descriptif de division et à l’affectation des lots déterminés par cet état.

 

La société P considérait, quant à elle, que le règlement de copropriété ne pouvait imposer aucune restriction à l’endroit des copropriétaires en dehors de celle qui serait justifiée par la destination de l’immeuble tel qu’il est défini aux actes par ses caractères et ses situations.

 

Que dès lors, elle considérait que les lots situés dans les étages de la résidence ne pouvaient avoir usage professionnel au prétexte que l’état descriptif de division inclus dans le règlement de copropriété le décrivait comme des appartements.

 

Ladite société considérait que ce moyen soulevé par le syndicat des copropriétaires était inopérant dès lors qu’elle constatait que le règlement de copropriété stipulait clairement que l’immeuble était destiné à un usage professionnel de bureaux commerciaux ou d’habitations en ce qui concernent les locaux situés aux étages et combles.

 

De telle sorte qu’au sens des articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965, ces derniers étaient bien fondés à transformer ces lots en locaux professionnels.

 

La société P était d’autant plus à même de soutenir cela qu’elle considérait que chaque copropriétaire était en droit d’user librement des parties privatives comprises de leur lots à la seule condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble.

 

Qu’importe l’état descriptif de division,

 

Pour autant la Cour de Cassation ne partage pas cet avis.

 

En premier lieu, elle rappelle que le règlement de copropriété avait conféré une valeur contractuelle à l’état descriptif de division de telle sorte que l’état descriptif de division affectait les locaux situés au dessus du premier étage et à une destination exclusive d’habitation.

 

Que l’état descriptif de division n’est pas en contradiction avec les stipulations du règlement selon lesquelles l’immeuble « était destiné à un usage professionnel de bureaux commerciaux ou d’habitation en ce qui concernait les locaux situés aux étages et combles dès lors que les dispositions de l’état descriptif de division étaient plus précises en ce qu’elles portaient sur chaque lot alors que la destination énoncée au règlement était de matière générale et distinguaient les étages au delà du premier.

 

A bien y comprendre, la société P ne peut obtenir de ce que ces locaux situés au 2ème étage ainsi qu’aux étages supérieurs ne soient occupés à titre professionnel.

 

Cette décision est intéressante en ce qu’elle rappelle la force de l’état descriptif de division, lequel vient compléter le règlement de copropriété surtout lorsque le règlement de copropriété a, justement, conféré une valeur contractuelle à l’état descriptif de division afin d’affecter les lots de manière bien précise.

 

La Cour de Cassation a bel et bien considéré que l’état descriptif de division auquel le règlement de copropriété avait conféré une valeur contractuelle affectait sans contradiction avec la destination de l’immeuble les lots situés au dessus du 1er étage de l’immeuble en copropriété à une destination exclusive d’habitation.

 

De telle sorte qu’en vertu de ce règlement et de l’état descriptif de division ayant valeur contractuelle, les locaux situés aux étages supérieurs ne pouvaient être occupés à titre professionnel.

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

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Sort du navire abandonné pour récupérer espace et créance

Quid du sort du navire abandonné sur un chantier portuaire ? Quelles sont les actions possibles pour le professionnel qui souhaite récupérer l’espace pris et le règlement de sa créance de réparation et, ou, de gardiennage,

 

Article :

 

Il convient de s’intéresser à la problématique du cas d’un navire abandonné par un propriétaire sur certains chantiers portuaires, qu’il s’agisse de navire de plaisance, bateaux, catamarans…,

 

Cela crée des difficultés importantes pour les exploitants qui se retrouvent avec un navire abandonné ou plusieurs navires abandonnés sur leurs chantiers maritimes, et qui viennent surcharger leur chantier maritime et parasiter leur activité.

 

Le professionnel a alors le sentiment de se retrouver avec un navire abandonné dans son parc,

 

Il arrive souvent que le propriétaire du navire abandonné disparaisse, aléas de la vie faisant, et laisse le navire entre les mains d’un professionnel.

 

La procédure est strictement réglementée concernant le navire abandonné et sur la base de textes fort anciens.

 

Il convient donc de présenter une requête au Tribunal afin de se faire autoriser à vendre le navire abandonné.

 

Il faut tantôt envisager la vente tantôt la destruction du navire abandonné afin de récupérer sa créance pour dettes non recouvrées.

 

Le professionnel, ou son conseil, présente une requête devant Tribunal d’Instance ou le Tribunal de Grande Instance dont dépend son domicile afin que le navire soit déclaré navire abandonné.

 

Peut se poser une problématique de compétence juridictionnelle lorsque la valeur de l’objet est inférieur à 10 000 euros mais que la créance a dépassé la somme de 10 000 euros.

 

C’est l’abandon de la chose qui est génératrice de la saisine du juge et c’est la valeur du navire abandonné qui va déterminer la compétence du Tribunal.

 

Aucune forme particulière n’est requise pour la requête bien qu’elle doit mentionner les éléments suivants :

 

  • La date de réception du navire désormais navire abandonné par le professionnel ce qui permet de déterminer le point de départ de la réclamation

 

  • La désignation de l’objet permettant de l’identifier clairement

 

  • Le prix réclamé par le professionnel ou une estimation du navire abandonné par une société professionnelle

 

  • Le nom du propriétaire et lieu où se trouve le navire abandonné,

 

Concernant le propriétaire du navire abandonné, il importe de préciser que celui-ci a vocation à être contacté et entendu par le Juge pour avis,

 

Fort de la décision rendue par le Président du Tribunal d’instance, le professionnel peut enfin organiser avec son huissier instrumentaire la vente ou la destruction du navire abandonné,

 

Dès lors, cette procédure qui est peu connue permet à un professionnel de vendre un navire abandonné par son client afin de récupérer son espace au sein de son chantier maritime ainsi que sa créance de réparation et de gardiennage,

 

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

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Espaces verts d’un lotissement et cession au profit de la Commune pour construire,

Est-ce qu’un colloti peut s’opposer à la désaffectation et au déclassement des terrains d’ espaces verts d’un lotissement par la commune pour ensuite vendre ladite parcelle pour un nouveau programme immobilier ?
Article :
Il convient de s’intéresser à la problématique du sort des espaces verts dans un lotissement lorsque la commune souhaite l’acquérir, procéder à sa désaffectation et son déclassement pour ensuite le revendre à un promoteur,
Dans cette affaire, un coloti avait acquis un bien immobilier dans un lotissement en 2003,
En 2006, son voisin entretient un morceau d’ espaces verts contigu, y plante des arbustes et finalement clôture ladite parcelle d’espace,
Informé de la situation le maire de la Commune intervient et obtient du voisin en question le retrait de la clôture,
Cependant, ces espaces verts contigu intéresse finalement la Commune qui envisage la vente des espaces vers du lotissement,
En 2012, est affiché sur la parcelle en question un panneau de « déclaration préalable de division avant de construire ».
Préalablement à cela, la Commune a pris soin de déclarer privé ladite parcelle pour accomplir cette formalité,
S’en suit en 2013 une enquête publique pour déclasser les espaces verts,
Mais un avis négatif est rendu par le commissaire enquêteur,
L’affaire ne s’arrête pas là,
En 2014, une nouvelle enquête publique est lancée concernant la modification du PLU,
La question de la vente desdits espaces verts revient à l’ordre du jour, et le commissaire enquêteur préconise alors la désaffectation et le déclassement des terrains d’ espaces verts avant toute vente.
Or, il convient de rappeler que les espaces verts doivent rester des lieux de promenade et de passage,

La question qui se pose est de savoir si un colloti peut s’opposer à la désaffectation et le déclassement des terrains d’espaces verts par la commune pour ensuite vendre ladite parcelle pour un nouveau programme immobilier ?

Pour répondre à cette question, il convient de revenir sur la notion d’ espaces verts,

La notion d’ espaces verts est apparue à la suite de la forte croissance de l’urbanisation.

Ainsi il est apparu comme plus que nécessaire de disposer d’espaces libres de constructions.

On peut définir, en urbanisme, les espaces verts comme tout espace d’agrément végétalisé (engazonné, arboré, éventuellement planté de fleurs et d’arbres et buissons d’ornement, et souvent garni de pièces d’eau et cheminements).

Un espace aménagé en parking ne peut donc pas être considéré comme un espace vert.

Même après une rétrocession, une commune ne peut vendre des espaces verts de lotissements.

Ces espaces bien qu’intégrés dans le patrimoine d’une commune suite à la demande du lotisseur ou de l’ASL, appartiennent au domaine public communal, qui est imprescriptible et inaliénable.

Seuls les biens appartenant à son domaine privé, ce que ne sont pas les espaces verts de lotissements, peuvent être cédé, vendus.

Dans l’hypothèse où la commune souhaiterait vendre ces espaces verts, elle devra entamer une procédure de désaffectation et de déclassement qui nécessite l’accord de l’unanimité des colotis.

Ce sont en effet des espaces verts de lotissements qui ont été cédés à la commune (à titre gratuit ou à l’euro symbolique) et non des terrains libres de droits.

La procédure d’expropriation permet ainsi à une commune d’éteindre les droits dont disposent toujours les colotis sur leurs espaces verts.

La procédure de désaffectation est la suivante:

– délibération du Conseil Municipal décidant la désaffectation,

– purge du délai de deux mois de recours,

– Les services municipaux vont ensuite cesser d’entretenir le terrain concerné,

– S’en suivra la pose de rubalise et le constat d’un policier municipal de la désaffectation actant que les espaces verts ne sont plus utilisés. En effet, au préalable à toute désaffectation, l’administration doit vérifier que ce bien n’est plus affecté à un service public ni à l’usage direct du public.

– Il y aura ensuite une nouvelle délibération en Conseil municipal actant la désaffectation et prononçant le déclassement du domaine public. Là encore, il faudra attendre la purge de deux mois de recours des administrés et du contrôle de légalité. Les administrés s’opposant à ce projet devront former un recours gracieux à l’encontre de la décision du Conseil Municipal.

– Ensuite seulement une division parcellaire sera effectuée par géomètre sur la base de l’emprise déclassée.

Le seul moyen de contourner la nécessaire unanimité des colotis pour la désaffectation serait d’entamer une procédure d’expropriation qui elle aussi est très encadré et doit répondre à une exigence de nécessité pour l’intérêt général.

Dans cette affaire, les espaces verts semblent bel et bien utilisés par le public et semblent régulièrement entretenus,

Dès lors, il est difficilement envisageable en l’état de justifier de la désaffectation des espaces verts concernés,

Si la commune continuait malgré tout dans cet voie, il conviendra d’attaquer chacune des délibérations prises en conseil municipal et dans le cas d’une expropriation, il conviendra de faire un recours contre l’enquête publique dans les 2 mois de sa transmission au contrôle de légalite.

Le recours gracieux motivé doit être fait à l’encontre de l’enquête publique ainsi que de la décision du conseil municipal afin d’obtenir leurs annulations.

Dans l’hypothèse où la municipalité ne répondrait pas favorablement audit recours gracieux, il conviendra de formaliser un recours contentieux devant le tribunal Administratif compétent.

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,
Avocat, Docteur en Droit,
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Habitation légère de loisir et résiliation du bail

Un bailleur peut-il obtenir la résiliation du contrat de location de terrain nu au motif pris que son locataire a procédé à des agrandissements ou extensions de son habitation légère de loisir contraires au droit de l’urbanisme ?

 

Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu par la Cour de Cassation en ce début de mois mars 2018 qui vient aborder la problématique du respect par le locataire des règles d’urbanisme concernant l’implantation d’une habitation légère de loisir, dont la surface plancher est supérieur à 35m2,

 

La vraie question étant par ailleurs de savoir si le bailleur peut reprocher à son locataire, propriétaire de son habitation légère de loisir, de ne pas avoir respecté les règles urbanistiques et obtenir la résiliation du bail, aux torts du locataire ?

 

Dans cette affaire et par acte en date de 1982, Monsieur B était devenu titulaire d’un bail emphytéotique d’un terrain situé dans le Var, non loin de Saint-Tropez, lequel était découpé en 100 lots de sous locations, sur lesquels étaient installés par chaque locataire et sur chaque lot une habitation légère de loisir,

 

Par acte notarié du 21 juin 2004, Monsieur B avait consenti à Madame S un bail expirant le 1er janvier 2040, ledit bail stipulait sous le titre « destination » que le bien ne pouvait être utilisé que pour l’implantation d’une habitation légère de loisir.

 

Le bail contenait une clause résolutoire qui prévoyait « à défaut de paiement d’un seul terme d’une redevance à son échéance ou en cas de non respect des charges et conditions des présentes, quinze jours après une mise en demeure par pli recommandé avec accusé de réception restée infructueuse ou par suite d’inexécution d’une seule des clauses et conditions du droit d’occupation et de celles du règlement intérieur ci annexé, le bail sera résilié de plein droit si bon semble au bailleur après de mise en demeure de payer ou d’exécuter la condition en souffrance ».

 

Par acte notarié du 4 janvier 2006 Madame S avait cédé son droit au bail à Monsieur R, le bailleur étant intervenu à l’acte.

 

L’acte de cession prévoyait :que le bailleur, Monsieur B, intervenait à l’acte,

 

Ledit acte rappelant que le bien loué ne pourra être utilisé que pour l’implantation d’une seule habitation légère de loisir d’une superficie maximum de 35m2 et d’un modèle agrée par Monsieur B.

 

Toutefois, il ressort des circonstances de la cause que le locataire en question avait procédé à des extensions importantes de son habitation légère de loisir,

 

En effet, le bailleur s’est retrouvé à reprocher à Monsieur R d’avoir fait agrandir son chalet au-delà de la superficie autorisée, et ce, en violation des clauses visées dans l’acte de cession.

 

Par commandement d’huissier en date du 6 décembre 2012, Monsieur B a délivré à Monsieur R une injonction d’enlever l’extension sur l’habitation légère de loisir et l’abri de jardin puisque la surface de l’habitation légère de loisir était supérieure à 35m2 en violation des stipulations du bail.

 

Le commandement visait la clause résolutoire stipulée dans le bail.

 

Une procédure devant le Juge des référés avait été engagée et par ordonnance du 15 mai 2013, le Juge des référés avait dit n’y avoir lieu à référé aux motifs que la question de savoir si la clause résolutoire stipulée dans le bail du 21 janvier 2004 pouvait être invoquée à l’appui d’un manquement à une obligation convenue ultérieurement en 2006 alors que l’habitation légère de loisir édifiée soulevait une question qu’il n’appartient pas au Juge des référés, Juge de l’évidence, de trancher.

 

Monsieur B, bailleur, a alors assigné Monsieur R devant le Tribunal de Grande Instance de Draguignan aux fins de voir constater la résiliation du bail et la remise en état des lieux.

 

Si le Tribunal de Grande Instance a fait droit à la demande du bailleur, la Cour d’Appel a infirmé le jugement.

 

La question qui se posait était de savoir si le bailleur était en droit d’opposer à son locataire le non respect des dispositions urbanistiques concernant son habitation légère de loisir ?

 

Il convient de rappeler qu’en application des dispositions R 421-9 du Code de l’Urbanisme, l’implantation d’habitation légère de loisir dont la surface de plancher doit faire l’objet d’une déclaration préalable de telle sorte que le bailleur serait en droit d’exiger du preneur qu’il respecte la réglementation en vigueur, peu important que les dispositions législatives ou réglementaires impératives ne soient pas expressément rappelées dans le bail.

 

La Cour d’Appel retient que l’obligation de déclaration préalable n’étant pas contractuelle, il n’appartenait qu’à l’administration de se prévaloir de cette disposition.

 

Cette décision est discutable,

 

Ceci d’autant plus que Monsieur S s’était engagé dans l’acte de cession du droit au bail, à respecter une superficie maximale de 35m2 pour l’implantation de son habitation légère de loisir et qu’il avait manqué à cette obligation, de telle sorte que le bail pouvait être résilié et que le bailleur pouvait s’en prévaloir.

 

Dès lors, l’implantation d’une habitation légère de loisir de plus de 35 m2 dans un parc résidentiel de loisirs ne saurait être admise et serait soumise à déclaration préalable en application de l’article R 421-9 du Code de l’Urbanisme.

 

Il n’en demeure cependant pas moins que, cette obligation n’est pas contractuelle, il n’appartiendrait qu’aux autorités administratives de se prévaloir de cette disposition,

 

Sauf pour Monsieur B, bailleur, à prouver que l’administration aurait exigé du bailleur principal, sous peine de sanction, la réduction ou la démolition de cette construction soumise à simple déclaration.

 

Malheureusement la Cour de cassation demeure rigide en pareille matière,

 

La Cour de Cassation considère que l’obligation de déclaration préalable n’avait aucune portée contractuelle de telle sorte que le bailleur ne peut donc pas l’évoquer,

 

Et encore moins solliciter la résiliation du bail,

 

Cela est d’autant plus regrettable que la Cour va remettre en question les analyses faites par le constat d’huissier puisqu’elle considère que cela n’emporte pas démonstration de ce que la superficie de 35m2 de l’habitation légère de loisir serait dépassée de telle sorte que seule l’intervention d’un géomètre expert aurait permis de caractériser le dépassement de ladite superficie.

 

La Cour considère que s’il s’avère que ce bail qui lie les parties et les obligations qui en découlent à peine de clause résolutoire, ne contient aucune exigence au regard de la superficie maximum de l’habitation légère de loisir que le locataire était autorisé à implanter.

 

De telle sorte que la résiliation ne saurait être encourue,

 

Tant au stade de la procédure de référé que devant le Tribunal de Grande Instance statuant au fond,

 

Cet arrêt est intéressant,

 

Il rappelle que le bailleur n’est malheureusement pas forcément à même d’imposer à ses locataires de respecter des règles, sinon de bonne conduite, à tout le moins des dispositions d’ordre public et de droit urbanistique,

 

A mon sens, la rédaction des contrats de baux est indispensable, afin de permettre à la fois au locataire de respecter les normes urbanistiques en matière d’habitation légère de loisir, et à la fois au locataire de sanctionner contractuellement le locataire indélicat en obtenant la résiliation du bail, aux torts dudit locataire cela va sans dire,

 

A bon entendeur…..

 

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

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